#LVME l Notre impasse,, en sept paragraphes au lieu de six l Natacha Devie

Tout en haut, à la jonction avec la départementale, une psychologue, son chien et son mari. Le jardin tout contre la route est caché par une épaisse haie, à l’image de la vie de la psychologue, que je ne perçois que comme une chose qui désire se cacher. La psychologue est d’ailleurs peu loquace, et nous nous le tenons tous pour dit, même si elle ne l’a pas dit.

La route continue en ligne droite entre les prés sur une cinquantaine de mètres, tourne à 180 degrés à droite, à l’endroit précis où se tient, sur la gauche, la ferme d’un couple recomposé à la retraite, genre paysans mais pas paysans, le rapport à la terre de monsieur se limitant à passer la journée à parcourir son territoire sur son quad dernier cri. Plus causants que la psy, mais nous prenons grand soin à les caresser dans le sens du poil, car ils ne manquent pas de nous faire sentir que l’ambiance pourrait vite changer si nous oubliions qu’ils étaient là en premier. À part ça, toujours le salut aimable et, pour madame, la blague à la lèvre.

Un nouveau virage à 180 degrés à gauche, puis la route serpente en descendant entre prés sur une grosse centaine de mètres, jusqu’à ce qu’un chemin de terre parte sur la droite. Il mène au bout d’une trentaine de mètres chez la doyenne de l’impasse, 101 ans, et ma foi en assez bon état. Elle vit seule mais reçoit de nombreuses visites qui font le gros de la circulation dans l’impasse : personnel soignant et famille. Elle adore nos visites et se passionne pour tout récit concernant la vie de ses voisins.

Peu après l’impasse de la doyenne, la route se transforme en chemin et plonge dans la forêt. Encore cent mètres et sur la droite apparaît une maison en bois toute neuve, encerclée d’arbres, presque toujours vide : une kinésithérapeute de la ville, qui rêvait de nature, l’a fait construire, mais elle a du mal à sauter le pas, dit-elle. Alors elle fait une apparition de temps en temps, passe même la nuit dans ses moments de grand courage, puis repart se rassurer dans la promiscuité urbaine jusqu’au prochain élan de témérité, ou de culpabilité. Pas très liante, sauf quand elle l’est trop. Je l’évite, ce qui est dur, puisqu’elle vit sur le bord du chemin où je promène le chien.

Encore trente mètres à travers bois. Sur la gauche, en surplomb, en haut d’un pré, la maison de ma sœur, de mon beau-frère et de ma nièce. Pas plus de détails pour le moment.

Encore vingt mètres à travers prés, et sur la droite, sous un bouquet d’arbres, ma cabane, ancienne cabane à chèvres retapée, neuf mètres carrés habitables, et le reste pour la démerde et le stockage.

Quarante mètres, bordés à gauche par la forêt et à droite par un pré, et nous arrivons au bout de l’impasse. Après, c’est le début des grands bois qui mènent aux étangs et à la rivière. Avant cela, deux maisons qui se touchent presque, à angle droit l’une de l’autre : un peu en surplomb, orientée Est-Ouest, la maison de ma tante, son compagnon et leur chien. En dessous, orientée Nord-Sud, la maison de mes parents. L’ordre et les raisons d’arrivée des membres de ce groupement familial seront peut-être évoqués plus loin, selon la direction que Mr Bon décide de donner à ce parcours.

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