Ils se disaient ça quand elle était vivante : les murs c’est fait pour les sauter, pour les faire tomber. Ça occupe. Ils avaient vu tant de murs monter pour empêcher les gens de passer, murs de pouvoir, murs de ségrégation. Frontière mexicaine, Israël, pays auxquels elle et lui étaient attentifs. ils haïssaient les murs, déclinés sous toutes leurs formes, dans les aéroports, des barrières comme pour des troupeaux d’animaux. Il faudrait trouver les mots pour dire des murs transparents, de murs qui n’existent pas.
Le sol est de bois doux, le mur tapissé de tableaux abstraits. Les tableaux tiennent le mur tant il est fin et fragile
Par terre un tapis de haute laine fraiche, les murs sont de brume, presque transparente.
Dans la grande maison, le moins de murs possible. Pour tenir le plafond, pour faire de l’ombre les jours de grand soleil, pour protéger du froid les soirs d’hiver. Un mur, un toit. On lui a dit qu’il faudra rendre les murs plus isolants, le plafond aussi, épaissir encore. Obsession de l’époque isoler, éloigner, barrer. Autour des chambres, des murs.
Il se demande s’il n’a pas passé son temps à construire des murs sur le chemin de sa vie. Mais il trouvait en même temps — ça prenait parfois du temps — la solution pour les sauter ou les faire tomber. Il est encore très fort pour se créer des obstacles, les sauter, c’est devenu plus compliqué.
Voilà ! Se creuser la tête pour, jusqu’au bout, trouver comment sauter les murs. Plus compliqué, l’ami : ne pas acheter les parpaings tant que tu n’as pas la solution pour faire tomber le mur que tu es en train d’imaginer.
Le sol est d’herbe, une girafe regarde au dessus du mur.