Peut-être qu’il est là, dans l’embrasure de la porte du sept. Peut-être que, malgré tous ses efforts pour se fondre dans le décor, la petite fille du quatrième le voit, sans comprendre, avec cette légèreté étrange qu’ont les enfants quand ils frôlent l’invisible.
Il avance. Ou plutôt, il suit. Le rythme, c’est celui d’un autre. Peut-être qu’à force de marcher dans ses pas, il s’attache, ou seulement à cette mécanique : avancer, suivre, se taire, effacer ce qu’on est, tout en espérant qu’un geste, un mot pourrait tout arrêter.
Quand il pousse la porte vitrée du numéro quatorze, il y a un instant de flottement, comme si le temps hésitait avec lui. La porte est plus lourde qu’il ne l’a imaginé, le métal froid contre sa main lui rappelle vaguement une sensation qu’il connaît sans pouvoir la nommer. Peut-être que son cœur s’est mis à battre un peu plus vite, d’accomplir quelque chose de plus grand que tout ce qu’on avait imaginé pour lui jusqu’alors. Il hésite encore devant l’ascenseur, il a toujours détesté ça, les grilles. Il prend l’escalier, une marche, puis une autre, le moelleux du tapis rouge. Peut-être qu’il y a cru quand il a sonné au premier et qu’on lui a ouvert la porte, il a répété plusieurs fois les mêmes mots, peut-être qu’il a espéré changer le cours de sa propre vie. Peut-être qu’en rentrant chez lui, il s’est dit que tout cela comptait, qu’il avait essayé, que cette fois, il ne serait pas seulement un homme de passage.