#LVME #02 | le gemmeur

On leur a parlé d’un grand terrain qui descend vers la mer, une maison au milieu, abritée de la dune, longtemps habitée par des gens qui se mélangeaient peu. Ils viennent voir pour plus tard, la solitude n’est plus une option, il garde œil et oreilles grands ouverts.
Ils se faufilent entre les arbres. Elle a l’élégance de celles qui sont à l’aise dans la grande ville et lui, il glisse entre pins et étangs, ils se soucient à peine de leurs gps téléphones. Il se souvient des dimanches après-midi pluvieux de l’enfance, le gemmeur soudain jailli des bruyères et ajoncs, comme s’il arrivait du bout du monde, on reconnaissait sa silhouette, son béret, on criait : le gemmeur ! le père aimait lui parler, ils échangeaient quelques mots très techniques sur la récolte de l’année, il donnait un coup de sa grande faucille sur une saignée faiblarde, redressait le petit pot de terre sous la coulée de résine et repartait, droit comme ses arbres, indifférent, vers ce qu’ils imaginaient solitude sans fin.

A propos de bernard dudoignon

Ne pas laisser filer le temps, ne pas tout perdre, qu'il reste quelque chose. Vanité inouïe.

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