Novembre gris, entre chien et loup, les parapluies aussi sont tristes, les façades moroses, quelques ampoules flambent derrière les fenêtres en réponse au flamboiement des feuilles des tilleuls. Elles volent et dénudent les branches mouillées. Bancs de pierre ni bancs de bois n’accueillent le passant, même pas celui aviné qui oublie le confort. De l’eau, il y a de l’eau. De l’eau dans le ciel, de l’eau dans le bassin, de l’eau dans le bain des enfants, de l’eau dans les bouilloires.
Novembre gris, entre chien et loup, les parapluies sont rares, les façades se découvrent derrière les tilleuls dénudés par le vent. L’eau de la fontaine, ou la pluie, ou les deux, c’est le même bruit, un bruit qui mouille. L’eau de la fontaine prend couleurs. Une large façade de rez-de chaussée s’est éclairée. Des silhouettes apparaissent qui brandissent le parapluie dès le passage des portes vitrées pour sortir.
Novembre gris, entre chien et loup, les parapluies sont en fête pendant dix minutes et traversent rapidement les pelouses couvertes de feuilles jaunes. Les façades disparaissent dans la pénombre qui s’installe et la lumière choisit ses fenêtres au hasard. Le jeu d’ombres et de lumières commence. Tout le monde n’y participe pas. Certains baissent les volets.
Novembre gris, peut-on dire entre loup et chien pour marquer la progression vers la nuit ? On va vers la nuit. On y va rapidement. Il fait plus sombre près du sol que dans le ciel. Les ombres chinoises se précisent aux fenêtres. Les lampadaires sous les tilleuls sont allumés. La fontaine rayonne en bleu, en rouge, en violet. La pluie n’a pas de couleur. Plus de parapluies. Tout se passe à l’intérieur. Un léger voile de buée sur les fenêtres, là où sont les cuisines.
Novembre gris, il fait nuit, presque nuit. La large façade du rez-de chaussée s’est éteinte. Des fenêtres se sont allumées, d’autres éteintes avec le jeu des volets que l’on baisse. Bientôt la fontaine va retenir son flot. Un chien fait le tour des troncs d’arbres en reniflant. Fait le tour et pisse. Son maitre attend dans la voiture garée à quelques pas, la porte grande ouverte, le visage éclairé par l’écran de son téléphone.
Il ne reste de novembre gris que la pluie. Maintenant c’est la nuit. Plus le bruit de la fontaine, ni ses illuminations. La lumière aux fenêtres, quand il y en a, est bleue à quelques exceptions près. C’est le temps du petit écran.