Ce cinq novembre deux mille vingt-quatre aux environs de huit heures, elle allume la radio. Ça se confirme, l’homme à la peau orange a été élu. Une partie de la nuit, elle a écouté des émissions sur YouTube. Surfant de l’une à l’autre. Léger espoir à 3h00 du matin. Et puis non. Les États clés ont voté pour l’homme à la peau orange. Alors, elle s’est endormie. Ce matin le verdict est implacable.
Ce cinq novembre deux mille vingt-quatre aux environs de huit heures, elle regarde par la fenêtre une tasse de café à la main. Le jour se lève. Au loin, les deux flèches de la cathédrale sont encore dans la brume. En pensée, elle commence à organiser sa journée de télétravail, les coups de fils à passer, la réunion en visio à onze heures. Mais avant toute chose, elle attrape le livre de poésie du moment, intiment [3e personne du pluriel] de Marina Skalova, et lis quelques pages.
Ce cinq novembre deux mille vingt-quatre aux environs de huit heures, il court d’un bout à l’autre de l’appartement. On entend ses petits pas résonner à travers le plancher. Il marche depuis deux mois.
Ce cinq novembre deux mille vingt-quatre aux environs de huit heures, elle est assise dans son fauteuil. Déjà depuis de longues heures. Nuit d’insomnie. Elle visionne sur sa télévision des films de Chantal Akerman. Une rétrospective est programmée dans le cinéma du quartier, mais elle n’a plus la force de sortir. Alors, elle puise avec délectation les DVD dans le coffret intégral de l’œuvre de la cinéaste sorti à l’occasion d’une exposition au Jeu de Paume à Paris.
Ce cinq novembre deux mille vingt-quatre aux environs de huit heures, il range son salon. Hier au départ de ses amis il a tout laissé, trop fatigué pour débarrasser bouteilles, assiettes avec reste de nourriture, cendriers débordants et jeux de sociétés.
Ce cinq novembre deux mille vingt-quatre aux environs de huit heures, elle peint. La nuit a porté conseil. Elle termine le tableau en attente depuis deux semaines sur le chevalet dans la chambre-atelier.