C’est comme d’attendre ton bus dans les chiottes publiques, cet abri noyé dans la nuit avec ses murs couverts de propos sordides. Mains dans les poches, sautillant sur place, tu patientes la goutte au nez. Puis arrive le car du ramassage scolaire, balayant de ses phares le rond point déjà décoré pour les fêtes. Ça trépigne pour entrer, ça se bouscule en silence. Vite, filer vers les places du fond. Tes écouteurs vissés dans les oreilles tu plonges dans ta bulle, le volume sonore de ton mp3 poussé à sa limite. Ne pas avoir à entendre les gamineries des petits cons, fils de bouseux qui chahutent. Coulé dans tes vêtements trop larges, tu passes l’album de Lunatic en boucle. Tu t’identifies, tu vis ta fiction – le car traverse des no man’s lands que la nuit dérobe. Entre ces tronçons – trous noirs – , des bleds fardés aux lueurs des lampadaires. Et le parking désert du centre commercial, et les maigres cités somnolentes… Au prochain virage tu apercevra la multitude incandescente des brasiers dérisoires qu’entretiennent les fumeurs : lumignons brandis comme des sémaphores à l’approche des côtes. Tu sais qu’aujourd’hui non plus tu ne passeras pas la grille ; que tu trouveras refuge dans les caves de l’immeuble d’en face. Tu portes déjà leur odeur sur tes vêtements.
Légende de la photo: Berck. Mots clés: 2010-2016+ Ensemble+ été+ Santé+ Contemporain+ Marquenterre+
Moi aussi j’aime les villes du Nord et j’aime votre texte, merci.