#mardis #08 | ELLE

Personnage seul dans une pièce avec une fenêtre

Version 1

Elle est assise sur son lit. Ses membres fragiles l’empêchent de se lever, de se mettre en mouvement, de déplier ses jambes et chercher une force pour s’extraire de ses draps. Sa tête contre le mur, elle s’imagine à sa fenêtre, debout, tenant sur ses deux pieds, les yeux dans le ciel bleu à regarder défiler les nuages blancs. Elle ferme les yeux et puise en elle un peu de vie. Le peu de muscles qu’il lui restent se contraint à son effort et déjà son buste se plie vers l’avant.

Version 2

Elle est encore assise sur son lit. J’espérais la voir dans le fauteuil ou à la fenêtre, debout, tenant sur ses deux pieds, les yeux dans le ciel bleu à regarder défiler les nuages blancs. Je m’imaginai qu’aujourd’hui enfin, nous pourrions échanger un regard, peut-être un sourire et pourquoi pas, aller jusqu’à entrebâiller la fenêtre pour se parler. Mais elle n’a pas bougé depuis hier, comme si elle ne s’était même pas allongée pour dormir, comme si tout était resté intact, à sa place. J’espérais avoir le courage de m’approcher pour qu’elle puisse me voir mais je n’ose pas, non, je n’ose pas. Peut-être me vaudrait-il mieux passer par la porte d’entrée ? Mais je ne peux pas, non, je ne peux pas. Pas aujourd’hui, demain, peut-être.

Version 3

J’aimerai tellement être debout à ma fenêtre, tenant sur mes deux pieds, les yeux dans le ciel bleu à regarder défiler les nuages blancs. J’aimerai me mettre en mouvement, déplier mes jambes, trouver une force pour m’extraire de mes draps mais mes membres que je sens, jour après jour, devenir si fragiles m’empêchent de me lever. Je ferme les yeux et puise en moi un peu de vie. Le peu de muscles qui me restent se contraint à mon effort mais épuisée, je retombe. Je ne peux pas bouger, non, je ne peux pas. Pas aujourd’hui, demain, peut-être.

A propos de Clarence Massiani

J'entre au théâtre dès l'adolescence afin de me donner la parole et dire celle des autres. Je m'aventure au cinéma et à la télévision puis explore l'art de la narration et du collectage de la parole- Depuis 25 ans, je donne corps et voix à tous ces mots à travers des performances, spectacles et écritures littéraires. Publie dans la revue Nectart N°11 en juin 2020 : "l'art de collecter la parole et de rendre visible les invisibles" voir : Cairn, Nectart et son site clarencemassiani.com.

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