les mardis #07 | variations autour d’un rectangle vert

C’est un rectangle vert. Il pleut et on dirait qu’il neige : les gouttes font de petits points blancs ronds épais qui se déposent légères et invisibles sur les feuilles de bananier. Et la pluie tout soudain, plus intense, et la neige fond en grosses gouttes d’eau qui se posent, globes transparents sur les feuilles épaisses, certaines s’accrochent, d’autres dégringolent en perles brillantes. Au fond du rectangle un arbre gigantesque envahi d’épiphytes et de lianes. Et tout autour une végétation dense que je ne sais nommer mais dont je peux deviner les feuilles toutes neuves d’un vert éclatant et les feuilles vieillies, plus sombres. Sous les assauts de la pluie et du vent, les feuilles plient, d’autres tombent. Ca frémit, ça mugit, ça palpite, ça se balance, ça luit. Quelques trouées. Tôle grise. Toit d’une case. Et puis la mer sans doute. Mais aujourd’hui tout est gris. 

Variation 1 : moins les subordonnées et la pluie d’un seul tenant grâce au « et »

C’est un rectangle vert. Il pleut et il neige, on dirait, et les gouttes font de petits points blancs ronds épais, légères et invisibles sur les feuilles de bananier et la pluie tout soudain plus intense et la neige fond en grosses gouttes d’eau, globes transparents sur les feuilles épaisses, certaines s’accrochent, d’autres dégringolent en perles brillantes et au fond du rectangle un arbre gigantesque envahi d’épiphytes et de lianes et tout autour une végétation dense, les feuilles toutes neuves d’un vert éclatant et les feuilles vieillies, plus sombres et sous les assauts de la pluie et du vent les feuilles plient d’autres tombent et ça frémit et ça mugit et ça palpite et ça se balance et ça luit. Quelques trouées. Tôle grise. Toit d’une case. Et puis la mer sans doute. Mais aujourd’hui tout est gris. 

Variation 2 : on dirait

On dirait. Ce serait un rectangle vert. Il pleuvrait et on aurait dit de la neige : les gouttes feraient de petits points blancs ronds épais qui se déposeraient légères et invisibles sur les feuilles de bananier. Et la pluie tout soudain, plus intense, et la neige fondrait en grosses gouttes d’eau qui se poseraient, globes transparents sur les feuilles épaisses, certaines s’accrocheraient, d’autres dégringoleraient en perles brillantes. Au fond du rectangle un arbre gigantesque envahi d’épiphytes et de lianes. Et tout autour une végétation dense que je ne saurais nommer mais dont je pourrais deviner les feuilles toutes neuves d’un vert éclatant et les feuilles vieillies, plus sombres. Sous les assauts de la pluie et du vent, les feuilles plieraient, d’autres tomberaient. Ca frémirait, ça mugirait, ça palpiterait, ça se balancerait, ça luirait. Quelques trouées. Tôle grise. Toit d’une case. Et puis la mer sans doute. Mais ce jour-là tout serait gris.  On dirait.

Variation 3 : il y a de cela très longtemps

Il y a de cela très longtemps. C’était un rectangle vert. Il pleuvait et on aurait dit qu’il neigeait : les gouttes faisaient de petits points blancs ronds épais qui se déposaient légères et invisibles sur les feuilles de bananier. Et la pluie tout soudain, plus intense, et la neige fondait en grosses gouttes d’eau qui se posaient, globes transparents sur les feuilles épaisses, certaines s’accrochaient, d’autres dégringolaient en perles brillantes. Au fond du rectangle un arbre gigantesque envahi d’épiphytes et de lianes. Et tout autour une végétation dense que je ne savais pas nommer alors mais dont je pouvais deviner les feuilles toutes neuves d’un vert éclatant et les feuilles vieillies, plus sombres. Sous les assauts de la pluie et du vent, les feuilles pliaient, d’autres tombaient. Ça frémissait, ça mugissait, ça palpitait, ça se balançait, ça luisait. Quelques trouées. Tôle grise. Toit d’une case. Et puis la mer sans doute. Mais alors tout était gris.  Il y a de cela très longtemps.

A propos de Émilie Marot

J'enseigne le français en lycée où j'essaie envers et contre tout de trouver du sens à mon métier. Heureusement, la littérature est là, indéfectible et plus que jamais nécessaire. Depuis trois ans, j'anime des ateliers d'écriture le mercredi après-midi avec une petite dizaine d'élèves volontaires de la seconde à la terminale. Une bulle d'oxygène !

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