Les mardis #06 I 11 trahison

Le professionnel (François parle encore, ce mot qui vous définit comme quelqu’un de compétent, pourtant des professionnels incompétents j’en ai croisé, j’ai toujours trouvé qu’il était estimable d’être un amateur, c’est sûrement lié à l’admiration de mon père pour les athlètes olympiques, moi je suis quoi, je ne sais pas), le matériel (je crois qu’ils commencent à manger, je n’entends plus rien, si, des bruits de fourchettes sur les assiettes, l’eau du voisin du dessus coule, j’entends son bruit dans mon bureau, quelqu’un perce un trou avec une perceuse, ou alors c’est un robot dans une cuisine) : ne vous fiez à personne (c’est impossible, comment peut-on vivre sans se fier aux autres) votre réussite (laquelle ? Le robot tourne, dans ces jeux de tarots, il soigne le client, le bruit des voitures est lointain) ou votre talent feront bien des envieux ! (il continue à brosser le lecteur dans le sens du poil, le talent, j’aime bien cette notion de talent, après tout, c’est simple tu n’as pas de talent, ce n’est pas de faute, c’est la vie, si on devait travailler ou chercher comme un fou, pour réussir, ce serait dur d’accepter sa flemmardise, mais c’est le destin, il y a des gens qui ont du talent, une sorte de pouvoir magique, et il y a des envieux de ce talent, lequel, il est où). Aussi certains sont prêts à vous jouer des tours (des tours ces derniers temps j’en ai connu quelques-uns, franchement ça ne valait pas la peine d’en faire autant, les envieux ont fait du zèle) pour vous prendre votre place ou vous démoraliser (ma place, oui elle est enviable, c’est juste, j’ai de la chance, j’ai toujours eu de la chance, mais j’ai payé le prix des gitans, me démoraliser, je fais avec, comme tout le monde). Tendez le dos (d’où vient cette expression, tendre le dos, pour prendre des coups encore plus facilement, cette une expression de masochiste , il faut courber le dos, essayé de disparaître) et résister aux assauts de ces furieux (c’est trop théâtral, la vie est plus modeste, les gens vous oublient, vous méprisent, c’est largement suffisant) cela ne durera pas (une éclaircie, j’aime ce mot éclaircie, j’aime la pluie) la situation matérielle aura tendance à se détériorer (ça ne m’a jamais inquiété, c’est une chance de passer une enfance sans argent, après on s’en moque) de mauvais investissements, des conseils pernicieux et surtout une très mauvaise gestion (je ne suis pas Proust, c’est encore du théâtre, cette phrase ne veut plus dire grand-chose en 2024) pourrait me valoir de sérieux ennuis financiers (les bruits de l’immeuble disparaissent, le repas ou la télévision occupent les esprits) surtout n’accordez pas votre confiance (cache tes sous Mamie ! le grand méchant va te les voler, quelqu’un vient de faire tomber quelque chose au-dessus de ma tête, ils parlent) les projets sont douteux (non, mes projets sont clairs, à peu près, enfin presque tous) les trahisons sont dans l’air du temps, ( je m’en suis aperçu, des petites trahisons, on trahi tous un jour, c’est ce qui est réconfortant chez les humains, on est tellement semblable que l’on peut se voir chez les autres, ils prennent le dessert, il y a encore un bruit d’eau, c’est l’heure des douches).

A propos de Laurent Stratos

J'écris. Voir en ligne histoire du tas de sable.

Laisser un commentaire