De Daudet: l’appel à la musique de la langue parlée, chuchotée sous les draps ou sur mon petit mange disque. Quarante cinq tours gravés de la voix de Fernandel et la Provence et le soleil et les cigales dans l’accent qui roule comme les pierres sous les sabots de la petite chèvre, et les Reviens! Reviens! Du désespoir couru d’avance de la corne de Mr Seguin. Véritable hymne à la liberté, la liberté jusqu’à la mort…
De Kessel: prend moi par la main et partons en voyage. Le soleil brûlant les paysages arides de l’Afrique sont ici même entre les quatre murs de ma chambre. Et l’ombre du crépuscule dessine comme une crinière au chat couché en rond au pied de mon lit.
De Zola: comme un passage obligé de l’explication de texte à mon livre de chevet. Edition commenté et annoté du collège. Et puis Gervaise et puis l’amour des mots, n’économisons pas les mots! Oui mais le mot juste, l’adjectif parfait, ciselé avec la précision d’un orfèvre. Et la phrase, se rythme, et prend vie, au gré de la ponctuation. Juste.
De Flaubert: voyons les choses en grand! Haut les cœurs, les flammes de la passion et le romantisme qui sied si bien à un cœur adolescent. Et l’élan langoureux, et la beauté parfaite. Se laisser flotter sur les phrases et garder en mémoire le souvenir d’une traversée, un seul soupir, de la couverture à la dernière page.
De Baudelaire: révolution, choc, apoplexie, syncope. On a rien connu tant qu’on a pas goûté aux parfums subtils des fleurs du mal! Le spleen comme art de vivre. Réveille toi, les yeux hagards. Ne pas chercher à analyser, surtout pas! Mais ressentir…Tâtonner en contreplongée et en apnée, à l’aveugle, au travers des effluves de fumées d’opium.
D’Orwell: Comme un arrière goût de sang. Tiens 1984, mon année de naissance! Un air de déjà vu, de jamais vu, je ferme les yeux pour ne pas lire. Mais comment ne pas lire ? La dystopie poussée jusqu’au malaise. L’inconcevable pourtant couché la sur les lignes qui se distordent sous la torture. Un long cri silencieux qui vous laisse vide. Coquille de noix.
De Camus: la force de l’incipit. Le mot juste, rien que le mot juste. Pas plus. Comme un télégramme que l’on reçoit. Mais quel mot! Pas de fioriture. Rien d’inutile. Dissection sans fard de l’ordinaire. Brut.
De Sarraute: Léger comme l’art de la conversation. Et puis la douceur, l’innocence le temps qui passe aux côtés de l’impitoyable de la violence et du non dit tout entier résumé dans la paume de l’enfance.
De Toole: tout ce qui peut se passer sous une casquette verte. Et la certitude que (un jour) les imbéciles dirige(ro)nt le monde.
De Prévert: (re) découvert sur le tard. Pas trop mon truc. Poète de cour élémentaire…. Quelle erreur! Quelle méprise! Dépêche toi de photographier ces architectures sublimes et fragiles, cette dentelle délicate qu’il a su créer avec les mots. Dépêche toi! Plus tard il sera trop tard!
Très sympathique retour aux sources !!
Et pour Prévert… le géant « Etranges étrangers »
et le superbe Wood’stown de Daudet !
Merci Francoise! Quel plaisir tout ces livres évoqués ensembles!
un réel voyage… merci aussi pour la prise en charge graphique… et Sarraute pour représenter la moitié de l’humanité : ce sera elle à l’honneur pour « progression #4 » ce dimanche…
Merci François! Cet exercice m’a rappelé celui de « donner un nom » des outils du roman. Fait appel à quelque chose de viscéral cette relation au livre et cela peut paraître ridicule mais l’objet « livre » n’y est pas pour rien. Qui n’a jamais respiré l’odeur des livres?
Donc, avant de me jeter dans la 5, je vous visite et vois qu’évidemment c’est l’effet Baudelaire qui va emporter le morceau, comme un cri parmi ces admirations (partagées) merci!
Merci Catherine! Ah Baudelaire…! Hâte de lire votre#5