Le départ, c’est toujours un peu pareil, la destination, peu importe : Murços, Port-Arthur, Kirchbarkaü, idem. Levers de voyage, ça a un goût d’enfance, bouche pâteuse, nuque raide, sens émoussés. On est d’un bloc, corps et esprit emmêlés aux grains de la chaussée. On rêve, on se souvient, c’est tout de même : le panorama sur le Grand Chambéron en surplomb du Tage ; les rues trompeuses d’Amsterdam, ça use les souliers et vous laisse éveillé, seul, une nuit, un lit superposé, quelque part dans le Queyras, en colonie ; les maisons d’un village transmontanais, plongée dans le ciel, tournoiement des hirondelles, en nous, un sourire enfantin, toutes les places de Novgorod. Tout à trac, bascule et renverse, chaque membre, chaque muscle, chaque nerf, en transhumance – Caen, Le Mans, Tours – vendus au kilomètre – Poitiers – Bordeaux – Morcenx –, étalés sur le bitume du chemin – Hendaye, Andoain, Gasteiz –.