#techniques #01 | Le sentiment de l’été qui approche

Le sentiment de l’été qui approche, l’attente du vert profond, du soleil cru, peau rétractée sous la chaleur, crépitant, le sentiment des peupliers le long des routes, des branches secouées par le vent, le sentiment des champs brûlés, du jaune asséché, appelant l’eau fraîche, goutte à goutte évaporée, envie d’oublier, de se fondre dans la langueur des rêves, le sentiment des feuilles qui tremblent, des feuilles superposées, de la profusion, le cœur battant plus vite, battant plus fort, les yeux clos sous la membrane rouge du plein soleil, rejoindre un sentiment d’enfance, odeurs de pins et craquements légers, le sentiment de la mer proche, du scintillement, frôlant aussi des flash-backs calcinés percutant la mémoire, je voudrais éloigner l’inquiétude du plein été, la peur du plein été, du débordement, souvenir d’insectes cheminant dans la poussière, fermer les yeux et les rouvrir, le sentiment de la présence des arbres, de la profondeur des ombres, le sentiment d’attendre, vouloir et ne pas vouloir, vouloir au plus haut point et vouloir fuir, espérant, espérant, tendant son visage au vent, fermer les yeux et les rouvrir, à la fois vivante et morte, comme sidérée, corps immobile et palpitant, à l’affût d’un signe, vibration de l’air, battement du sang, entrer en l’eau froide, se glisser dans le lac entouré d’arbres, étirant ses bras dans l’eau sombre, le sentiment du dehors quand il s’invite dedans, dissolvant la frontière de soi.

A propos de Muriel Boussarie

Je travaille sur un chantier d’écriture au long cours et j’espère avoir assez de souffle pour le mener à terme. L’intuition de ce projet a surgi ici, dans un atelier du Tiers Livre. Il était question de se perdre dans la ville. Comme je ne voulais pas suivre une piste trop autobiographique, j’ai délocalisé l’errance en la situant dans la ville de K., un avatar de Hong Kong qui m’avait tant fascinée. Alors un personnage, un homme, Tu, toujours interpellé, est immédiatement apparu dans une rue de K. où il s’était égaré. Malgré cette entrée en matière – très forte pour moi – je n’ai pas pensé au départ écrire une histoire, encore moins un livre. Mais je voulais écrire, rêver un univers, celui de K. Quelques textes ont ainsi vu le jour sur mon blog. Puis lors d’un nouvel atelier de François Bon, un fil d’histoire plus précis s’est ébauché : le départ de Tu et L. vers les îles pour fuir la dictature qui sévit à K. À ce moment-là s’est déclenché un grand désir de narration. Beaucoup de choses se sont précisées au fil de l’écriture, bien des personnages sont apparus… Et régulièrement j’utilise des consignes de l’atelier comme pistes pour développer mon récit.

4 commentaires à propos de “#techniques #01 | Le sentiment de l’été qui approche”

  1. Espérer et redouter à la fois, on le ressent crescendo jusqu’à la belle dernière phrase.

    • J’ai relu le texte, intriguée par votre commentaire, et vous avez raison il y a là quelque chose d’animal, d’instinctif… Merci pour la visite Perle