Abandon de mon corps couché sur le côté droit mon regard ne recherche et ne fuit rien mon regard regarde il suit des lignes des formes et des couleurs l’espace est immense dans les limites du cadre étroit que la pose de mon corps impose à mon regard ici c’est le rêve au sommet d’une maison mon corps est couché dans un grenier minuscule sous l’arête du toit mon regard va et vient le long d’une partie de la poutre brune qui soutient le toit elle est veinée craquelée solide mon corps immobile prend sa solidité désire lui ressembler les pentes du toit ont des allures de tente une chute de neige m’a forcée de bivouaquer le sommet du K2 n’est pas loin je vais m’y propulser ou plonger dans le vide tout à l’heure maintenant je suis sous le toit du monde il suffit que je le pense en laissant mon regard errer à travers l’ immensité contenue dans le cadre étroit de la lucarne la poutre brune a pris l’importance d’une clé de voûte par la lucarne j’aperçois la nuit je suis sous la voûte du ciel l’une des deux parties vitrées de la lucarne a glissé dans l’encadrement de zinc mon corps désire conserver son immobilité de plomb il frissonne comme l’eau ridée d’un lac à cause du filet d’air frais qui s’infiltre par la faille de la lucarne des alvéoles claires tachent le plancher sombre du grenier à la base du morceau de vitre qui s’est déplacé une érosion a commencé
Abandon. De mon corps couché sur le côté droit. Mon regard ne recherche et ne fuit rien. Mon regard regarde. Il suit des lignes, des formes et des couleurs. L’espace est immense dans les limites du cadre étroit que la pose de mon corps impose à mon regard. Ici, c’est le rêve au sommet d’une maison. Mon corps est couché dans un grenier minuscule sous l’arête du toit. Mon regard va et vient le long d’une partie de la poutre brune qui soutient le toit . Elle est veinée, craquelée, solide. Mon corps immobile prend sa solidité, désire lui ressembler. Les pentes du toit ont des allures de tente. Une chute de neige m’a forcée de bivouaquer, le sommet du K2 n’est pas loin, je vais m’y propulser ou plonger dans le vide, tout à l’heure, maintenant. Je suis sous le toit du monde. Il suffit que je le pense en laissant mon regard errer à travers l’immensité contenue dans le cadre étroit de la lucarne. La poutre brune a pris l’importance d’une clé de voûte. Par la lucarne j’aperçois la nuit, je suis sous la voûte du ciel. L’une des deux parties vitrées de la lucarne a glissé dans l’encadrement de zinc. Mon corps désire conserver son immobilité de plomb. Il frissonne comme l’eau ridée d’un lac à cause du filet d’air frais qui s’infiltre par la faille de la lucarne. Des alvéoles claires tachent le plancher sombre du grenier à la base du morceau de vitre qui s’est déplacé. Une érosion a commencé…
Comment je reste, à vous lire, oppressé presque en plein ciel. Les espaces blancs y sont pour beaucoup.
étrange vision, tachetée de blancs auxquels vous ajoutez la correspondance des couleurs. Je vous ai lu à voix haute et ça sonnait comme une méditation, un peu inquiète parfois, mais surtout très ouverte. Je crois qu’il y a beaucoup de choses et encore beaucoup de mystères derrière ce texte. A suivre…
Merci Fil, merci Catherine, je suis très touchée par vos lectures!
Le rythme par la couleur et par le blanc, sentiment étrange en lisant ce texte d’entendre la couleur (surtout celle des mots corps et grenier, qui me frappaient comme des mots qu’on crierait au milieu du murmure). Il y a quelque chose de très musical dans votre texte. J’ai aimé cela.
Merci à vous! J’aime beaucoup votre appréciation musicale…
J’ai beaucoup aimé votre texte moi aussi, un texte qui s’admire d’abord de l’extérieur, comme un objet et dans lequel on se glisse ensuite…
Je suis tombée en admiration devant votre maison polychrome! Mon grenier refuge pourrait se trouver sous son toit, j’ai quasiment reconnu la lucarne…
un petit côté mosaïque pour réconforter
Oui, c’est plus joli! 🎨😊