Pelage fauve ou miel, que dit-on pour les chats ? Poussiéreux d’avoir voyagé. Ses territoires étendus, dangereux, d’où le risque n’est jamais absent, il porte clochette et s’en va chaque jour, qu’on dirait journey. C’est le chat de la voisine, l’arpenteur, fureteur de nouveaux sentiers, de chemins inconnues.
Que disent ses yeux oblongs, jaunes que je ne sache déjà ? Où vas-tu, chat, quand tu traverses la route ? Combien de kilomètres à pattes ? Combien d’arbres escaladés ? Vas-tu jusqu’au premier village voisin ? Jusqu’au massif ?
Il me dirait qu’il musarde dans ses pérégrinations, qu’il suit des yeux un papillon, une abeille. Il me dirait qu’il secoue ses coussinets posés dans une terre trop humide. Il y laissera ses empreintes que personne hormis l’enfant curieux repérera en pisteur. Il me conterait les acrobaties, le passage du muret, les sauts en souplesse pour atteindre le trottoir, l’œil aux aguets avant de traverser, tu vois, il ne s’est pas fait écraser. Il a passé le parapet, le petit pont, les pierres pointues. Il a suivi le fossé, reniflé les premiers pissenlits. Il a joué avec les aigrette. Il a éternué.
Jusqu’où es-tu allé aujourd’hui ?
Il parle sa propre langue qui dit qu’il a suivi un compère jusqu’à S. et que ça fait une trotte. Il a coursé des corbeaux, pleine volée de plein champs. Mieux que les chiens des fermes qui sont enfermés derrière les barrières. Il signale un changement notable à l’entrée de cet autre village. Les hommes retournent la terre du rond-point et ça sent le frais jusque dans ses moustaches. Il frétille du printemps annoncé et c’est la promesse de plus longues virées à travers la campagne.
Il se purge au passage d’herbes fraîches et lape un peu dans une flaque d’eau. Il pénètre dans le cimetière, il aime bien de temps en temps, c’est calme, ensoleillé, il se frotte aux tombes toutes gorgées de lumière. Il longe les rangées d’amandiers et se laisse submerger, pluie de pétales sur ses flancs battus par le vent.
Demain, il ira peut-être du côté de M., va savoir.