Le bourg. Une route triste encadrée d’immeubles ouvriers. Trapus. Austères. Les façades vieilles alignées dans un garde-à-vous morne et sévère. Certaines plus vives, le plus souvent salies depuis la naissance des jours. Les volets persiennes bancals. Bleu, vert pâle, rouille. Délavés, ternis sous le voile flétrisseur des poussières industrielles, l’ancien pollen de houille et de fer, l’inépuisable. Le trou béant de la guérite vitrée et sa barrière levante, le trou de l’entrée jusqu’à l’usine morte, le trou bouché d’un banc ou deux, un arbre ou deux au milieu des pavés blancs. Une route grise et ses modernes encoches de chicanes claires. On peut y stationner un véhicule pour l’obstacle. Les bosses des ronds-points pour canaliser la circulation en extinction. Un, cloué entre la carotte rouge et blanche du tabac et la croix clignotante de la pharmacie, en haut de ses trois marches. Le soleil d’été dans l’air immobile. Le soleil d’été pendu dans la pâte bleue pesante comme une masse, lourde comme l’ennui. À l’angle, sentinelle oubliée sur le trottoir, l’ardoise du bistrot jaunâtre. Le plat du jour en craie. Juste en face, offerte, nue, la friche pelée de l’ancienne scierie Brun aux parois de planches sombres. Imprimés dans l’air étouffant les cris ascendants du bois sous la lame. L’odeur chaude de la sciure. C’est le retour d’école.
sacrée musique…
sacrée proposition !