S’arrimer. S’ancrer dans la chair de la terre, sentir le poids, la tension dans les mollets, l’accroche des pieds qui glissent dans la glaise.
Tenir sur ses jambes, éprouver leur matérialité. Ne pas se perdre dans la tête. J’ai un corps. Ne pas se laisser envahir par les images dans la tête. S’arrimer, s’arrimer au flan de la montagne, se raccrocher aux racines des épicéas, leurs piqûres dans la paume maintenant.
Elle est face à la grotte. il s’agit plutôt d’une cavité façonnée par le ruissellement des pluies dans le talus qui surmonte le cours d’eau. Elle vient souvent et tout scintille. Elle reste là, isolée par la rumeur du torrent en contrebas. Fascinée par le jeu des brillances qui s’offre à elle, eau et lumière.
S’arrimer pourquoi. Pour ne pas céder à l’attrait du lieu, ne pas céder au charme du trou ruisselant. Ne pas se dissoudre. Il n’y a nul mystère, nulle vision. S’arrimer parce qu’on est encore un enfant et que personne ne sait où on se trouve.
Elle finira par par se lasser et s’en ira.