Papillon qui s’envole, tache qui sèche, tête de girafe au long cou tacheté, caravane qui passe, étoile de mer, contours imprécis d’un pays où je ne me suis jamais rendu, silhouette d’une très belle femme, couple qui s’embrasse, fleur de lys, livre ouvert, grenouille éventrée, vol d’hirondelles, cerf-volant tournoyant dans le ciel, dans le jeu, l’écart qui s’insinue entre les arbres du boulevard en contrebas et leur ombre portée, dans le mouvement chatoyant des feuilles qui se balancent et leur projection sur la paroi immaculée de la coupole que je contemple chaque jour depuis la fenêtre de mon bureau, sur la surface arrondie comme un œuf, blanche, parfois aveuglante sous le soleil estival. Décrire la paroi c’est se focaliser sur l’écran qu’elle dresse entre notre regard et notre point de vue, et tout ce qui, dans la perspective se juxtapose, de manière illusoire, comme dans ces vues d’optiques, images souvent coloriées à la main et destinées à être regardées à travers une boîte d’optique qui en accentue l’effet de profondeur. Chaque jour, chaque heure, chaque minute, chaque seconde, différente. L’arrondie de la surface de la coupole, sa blancheur préservée, inédite, été comme hiver, me renvoie en miroir à ma propre inconstance, me révèle vacillant, velléitaire. Matière réfléchissante, parfois aveuglante qui découpe au cuter les ombres des arbres plantés sur le boulevard, en décuple les contours accidentés. Le soleil tourne, dans la lumière changeante, selon l’heure et les saisons, des éclats lumineux se réfléchissent sur les immeubles voisins, se diffractent ou s’évasent sur la façade du bâtiment recouverte d’un mur rideau ondulant comme une vague. Ce qui se cache là-dessous, ce qu’accueille la coupole, qu’on ne voit pas à distance, caché, à l’abri des regards, qu’on devine ou dont on se souvient, ce sont les lignes épurées aux courbes élégantes, la moquette vert tendre, les fauteuils en cuir confortables, le mur en béton brut dans lequel le bois des nervures des planches choisies par les ouvriers a laissé sa trace unique, sa signature comme les marques lapidaires des tâcherons sur les édifices du Moyen Âge. Les milliers de petites lamelles métalliques blanches dissimulent au plafond les néons qui tapissent l’espace d’une lumière douce, sans ombre, traitées par électrolyse pour ne pas avoir à les dépoussiérer manuellement. Et quand on allume la salle du conseil, les néons se mettent à clignoter de manière asynchrone, cela ne dure quelques instants mais c’est si beau, que ce chant nous rappelle le pépiement des oiseaux à la campagne lorsque le jour se lève. Et c’est ainsi que cette paroi, rigide, opaque, qui protège l’auditorium en dessous et valorise ce lieu et sa puissance d’attraction, nous laisse parfois entrapercevoir à travers les couches superposées des arbres, et de leurs feuilles l’été ou de leurs troncs tortueux l’hiver qui brouillent notre vue, des oiseaux de passage comme la silhouette fuyante de passants qui troublent en oblitérant le paysage, l’apparence d’un écran où soudain tout devient possible. Flamme effilée qui s’effiloche au feu, diable sortie de sa boite, cheval qui se cabre devant un danger imprévu, main à laquelle il manque un doigt, nuage qui se dissipe dans le ciel du matin, sourire à peine esquissé, Gitane qui danse un flamenco, chien qui aboie.
j’adore – à peine si je ne vois pas, devant, le Suédois (je tiens une image avec une espèce d’engin futuriste présenté devant – je la cherche et je te l’envoie)
Je suis curieux de voir cette image Piero, vraiment impatient !
je l’ai retrouvée – je te la poste – et je la pose demain – si tu veux voir dans le journal…