Au matin, au milieu et dessus, il n’y avait rien autour. Non pas car il n’y avait réellement rien mais surtout car il y avait autre chose. Cette autre chose prenait toute la place. Une place impalpable, opaque et claire. Une place que l’on ne pouvait ni entendre, ni sentir, une place qui nous perd, nous frôle, nous touche et nous bouscule sans nous brusquer. Il ne restait alors que le son du moteur ; et fort du silence d’autour, il résonnait, tournant à vide dans l’eau sombre d’un matin de novembre.
La lumière pénétrait l’eau différemment. Rien ne changeait pour lui. Ni ses occupations, ni ses projets, ni sa bonne humeur qui ne le quittait jamais – il ne pouvait d’ailleurs pas dire si un jour il avait été malheureux – mais même pour lui, ce matin-là était différent. L’eau éblouissait d’un éclat argenté, inhabituel et surtout … surtout… aucun de ses amis ne remontaient à la surface pour rejoindre la lumière bleue près de la coque verdâtre et usée du bateau. Après tout, c’est peut-être normal, elle était argentée…pas bleue…Drôle de journée.
Au réveil, quelques minutes après, lorsqu’il ouvrit le zip de la tente le paysage ne ressemblait qu’à une mer, à un océan de vague nuageuse, à un bain de laine. Lorsqu’il levait les yeux, rien ne lui avait jamais semblé autant clair, jamais aucun ciel ne lui avait semblé si bleu, aucun matin ne lui avait semblé si unique. La nuit s’était couché à l’heure de son réveil sans jamais le brusquer. Debout, il observait le lac, là où il devait être. Et dans ce mur de fumé, se distinguait quelques failles d’où apparaissait un homme sur un bateau, et d’où ne se distinguait pas tout un monde sous-marin.