En empruntant la châsse, ce chemin de terre, on pense qu’on va pouvoir arriver à la mer que l’on voit en contrebas. Au bout du chemin, la présence imposante de cette barrière qui empêche en silence d’aller plus loin. Trois à quatre mètres de large, elle est composée de deux portails. A gauche un portail en fer entièrement rouillé, dont la partie haute est abimée, le métal est troué et semble sur le point de s’effriter, un grillage souple en fils de fer a été ajouté plus récemment. A droite, une autre barrière de prairie, en tubes d’acier gris clair galvanisés. Les deux portails sont attachés ensemble, de façon un peu dérisoire, par un simple fil électrique bleu et deux longues planches de bois les traversent, faisant semblant de consolider le tout. Un vieux piquet de clôture électrique, tige rouillée et petit chapeau de plastique noir, qui n’est plus relié à rien, est attaché par un cordon vert au portail rouillé. La nature a proliféré et déployé ronces et épines, des fougères vertes, jaunes et d’autres, roussies par le soleil, quelques épis de blé poussent tout du long. Les ronces ligneuses s’accrochent à la structure et les mûres y rougissent. La barrière domine ici dans sa capacité à barrer l’accès, à mettre au pas le randonneur, elle a un côté brutal, sauvage, une présence forte, une autorité muette. Tout est parfaitement à sa place et le fouillis, l’enchevêtrement de métal et de végétal apparait comme une composition savante, sophistiquée et dissuasive devant laquelle on s’incline. Rien ne semble plus abouti. Rien ne semble moins hasardeux. Le mélange de sauvage et de construit de la campagne nous dépasse et nous surplombe toujours un peu.