Il y en a qui vont au ski comme on tue des dames voyez-vous, des gens comme vous dans des occupations saines et des ventres mous, il y en a aussi qui ferment les portent, posent verrou et partent en vacances sur les routes, accumulent les étapes et les outrances, et finissent par rentrer il y en a qui sautent en parachute depuis des points tellement haut et ne peuvent pas comprendre pourquoi oh, certains soirs il faudrait pouvoir tenir une lame et arracher par poignées quelques-unes de leurs larme il y a ceux qui, la nuit, guettent inquiets les papillons sous les flammes de quelque ville de bruit il y en a d’autres qui vont au travail aussi, voyez-vous, ils mettent des cravates et des costumes fous quand il faudrait plutôt remonter les allées mal éclairées ils vont de métro en boulot en dodo et ne sautent pas d’un mur à un autre comme les chats le faisaient autre fois, ils parcourent la ville de jour et suent dans leurs chemises fours, serrés – de moi ils ne verront jamais odeur jamais trace- il y en a qui carte blanche, casino tous les soirs et alcools selon avoirs il y en a qui traquent -disant plutôt qu’ils draguent- pour rendre les trous de la nuit moins profonds mais qui ne se diront pas, qui ne se demandent pas. Moi je sais que la lumière de la peau blanche me fait décoller et qu’il vaut mieux pour vous que vous ne m’ayez jamais croisé.
La musique de votre texte m’entraîne dans son rythme oscillant entre humour et angoisse, minutie de l’observation sociale et légèreté apparente.
Si je ne me trompe pas, voilà un polar en germe, genre très aimé (de moi, bien sur, mais aussi ici d’Ugo Pandolfi et de beaucoup d’autres… on pourrait souffler ça à François : faire genre, une fois ou deux… ). Brava pour ce portrait en creux et les croquis acéré de nous autres, les herbivores, comme dit un ami.