Le sous-titre du carnet pourra être » Poinçons ».
- Cette question des premières impressions auditives m’a travaillé. Peu à peu l’idée du bloc s’installe. Lyrisme en langue étrangère, lyrisme étranger (et pourquoi les impressions qui m’ont saisi en arrivant au Maroc seraient-elles fondamentalement étrangères à celles ressenties par ce jeune homme de 20 ans débarquant à Alger ? Je peux mettre à contribution ces impressions auditives, ce choc esthétique et culturel).
- L’usage de la barre verticale : le couperet symbolique, les tranches de savoir (ah, Henri Michaux, Face aux verrous). La barre ponctue, hache, coupe les essors lyriques, rappelle le S barré de Lacan, mais je le garde comme une coupe musicale délimitant des mesures mélodiques, autonomes et interdépendantes, traces musicales de dépôts. Elle me sert à évoquer le mi-dit de la guerre (mi-dit car inconnue de moi, silencieuse sinon les traces qui m’ont traversé cinquante ans (sic)). J’en dois rendre compte.
- Ce carnet peut s’appeler « poinçons ».
- Jeu des temps verbaux (passé/présent/futur) pour permettre d’ancrer le récit dans une minuscule éternité (un précipité d’éternité). Comme l’a fait aussi Manchette dans Le petit bleu de la côte ouest ou La position du tireur couché.
- Arriver en Algérie : se poser sur la lune (Neil Armstrong, juillet 69, soit 11 ans après l’arrivée en Algérie : pas d’anachronisme). Arno Schmidt, Kaff auch Mare Crisium, traduit en On a marché sur la Lande : traduction géniale de Claude Riehl. Il y a de ça, donc.
- Greffons textuels mimant les corps étrangers (culturels, symboliques, etc.) qui traversent l’arrivant, y laissent une trace, un dépôt (encore – mais il ne s’agit finalement que de cela). Importance de re-présenter cette étrangeté culturelle dans le texte (arabe, etc.)
- Envie de passer du « il » au « tu » quand ce sera nécessaire, in time…et intime. Voilà le truc qui m’a inconsciemment guidé, soudain apparu à la faveur d’un jeu de mot anglais/français. Retrouver une espèce d’intimité avec lui, alors même que cinquante ans de notre vivant à tous les deux n’y ont pas suffi.
- Ce carnet : une mise au point-son.
- Sur la barre verticale encore : ce qui s’y joue. Avant | après : rétroaction du message sur le code et inversement, du message sur le message, du code sur le code. Avant la barre le(s) mot(s) crée(ent) une attente, en partie comblée par ce qui vient après la barre ; le comblement de ce qui vient après induit un(e) comparaison/ajout/retrait/évaluation des sens qui infléchissent la lecture de ce qu’il y a avant ; la barre fait violence au lecteur (pas d’essor mais une pause, le clivage qui renvoie à soi comme sujet qui lit (et qui lie) ; la barre isole, autonomise, il faudrait pouvoir y voir une partition musicale, sinon : raté.
Il y a dans ce carnet de réflexion sur le texte qui continue à s’écrire un joli contre pied (ou miroir plutôt) au journal du personnage amorcé dans L6 et qui, pourrait être une piste pour combler les brèches du réel sur lesquelles vous vous questionnez – le carnet étant forcément lacunaire, pour moi lecteur en tout cas, la question ne se pose pas.
Oui, c’est très juste…je ne l’avais pas vu….merci ! Il y a plus de choses dans deux têtes, etc. ;o)