43. Finalement parti sur La part du feu de Blanchot. Ai retrouvé les pages de Sartre sur la fumée, le tabac, dans le pavé de l’Etre et le néant. Servira sans doute pour le rapport à la cigarette.
44. Visionné la proposition 8 de François. L’idée de la musique, du lyrisme, m’a immédiatement amené à visualiser l’arrivée de mon père dans un port algérien (j’ignore encore lequel). Mais il a forcément entendu, pour la première fois de sa vie, l’adhân (ou appel à la prière lancé par le muezzin). Qu’en a-t-il pensé, lui le joueur de jazz (Sidney Bechet, entre autres) ? Voilà une approximation qui me parle. J’ai en mémoire vive mon arrivée au Maroc, quinze jours passés près de la médina de Salé. Voilà qui me donne les harmoniques. Qu’écoutait-on à Alger en 1958 ? Sans nul doute Dahmane El Harrachi, que j’écoute en écrivant ces lignes. Je vois qu’il est né en 1926 à Alger et qu’il s’est installé à Lille en 1949, puis à Marseille et à Paris. On devait donc l’écouter à Alger en 1958. Je ne suis jamais allé en Algérie (le Maroc oui, trois ans durant ; la Tunisie : quelques jours à Tunis, (ai vu le Cap Bon présent sur les tubes de harissa dont mon père agrémentait le couscous) accompagné d’un ami arabophone dans les rues populaires, entré à la grande mosquée). Je me suis fait la réflexion suivante : en avion, passé du Maroc à la Tunisie. J’ai enjambé l’Algérie. Et j’ai pensé à mon père. Drôle d’empan.
45. Me reste à écrire ce bloc continu (#L8) qui trouvera forcément sa place dans l’ensemble, plus tard. Heureux d’avoir quelque chose sous la main. Je réalise le rapport de la fiction à la réalité : si mon père ne m’a jamais rien dit de son arrivée en Algérie, je sais au moins qu’il y est arrivé, qu’il s’est frotté à cette culture inconnue. Dès lors, la part fictionnelle devient tout à fait vraisemblable et n’a pas à souffrir, selon mes critères personnels, d’une fantaisie illégitime. Il semble donc que l’espace du livre à venir et à occuper soit un peu moins étroite que je ne le pensais.