D’Artaud : quoi (kwa kwa) ? possible (donc) de naître sans papa sans mama ? en te dotant d’un maître (paradoxe) bien plus fort (énergétiquement parlant) que n’importe quel papamama & te bloquant (t’empêchant d’être) des années durant tant sa force (son impact) était terrible (terrific ou terrifiant) & sa puissance te ravageait.
De Burroughs : permis de voler (ou détourner) de remixer tout ce qui te tomberait sous la main & dans l’œil & qui (là) (à l’instant) (en direct & en live) ferait sens pour toi (intuitivement) selon ce grand principe : ceux & celles qui ont écrit avant toi des propos à propos des choses/états de choses/états d’esprit sur lesquelles toi (toi toi) tu voudrais écrire l’ont bien fait & beaucoup mieux que toi (toi toi) tu ne pourras jamais faire alors pourquoi se priver ? vole & pille = = pourquoi se casser le cul ? tout est déjà là (si bien dit) (prêt à servir).
De Tarkos : une bouffée d’air frais (un permis d’écrire « simple ») (soi-disant sans théorie) & hop hop & hop : voilà que tu t’y mets (voilà que tu alignes enfin deux phrases l’une après l’autre) première fois que tu nais (respire un peu)
De Verheggen : tu vas n’importe où (dans une librairie) & tu ouvres un livre (n’importe lequel) & c’est « pubères, putains » & « porches, porchers » & c’est B_A_N_G ! B_A_N_G ! & B_A_N_G ! : tu baignes dans une langue de boue & de bouse & tu comprends que cette langue ne pouvait être écrite que par un gars de ton coin & tu apprends que cette langue a été écrite (inventée) par un gars de ton coin & c’est révélation (réjouissance) : on peut écrire ça & écrire avec ça : le sang qui pulse & la pluie tombant comme un rideau fin translucide sur un champ de patates atteintes de mildiou & tout cela te donne l’envie d’embrasser la terre sur la bouche
De Saer : une fois de plus tomber dans une langue qui circonvolutionne & t’emmène dans des détours impossibles & sans fin & une fois de plus tu te laisses emporter & une fois de plus tu voudrais écrire comme ça (c’est ton rêve intime) (ton désir profond) & c’est la première fois que tu vois comment faire (envisage comment faire) un flux de paroles folles (parfumées) s’enchaînant l’une à l’autre dans des volutes sans fin gravitant autour de quatre ou cinq scènes (pas plus) les tournant & retournant à l’infini (les étirant en tout sens à l’infini) (potentiellement) & c’est un bonheur fou pour quelqu’un comme toi qui ne garde rien en mémoire des sensations émotions qui pourtant te traversent (comme tout le monde) & c’est un bonheur fou de te laisser traverser par : les sensations émotions d’un autre & d’enfin avoir un corps
De Noon : tu surfes sur le net & t’es – H_O_P ! – happé par la couverture d’un livre que tu ne liras pas (pas besoin de le lire pour être happé à vie = = un livre pouvant te nourrir à vie sans avoir le besoin de le lire d’une traite & totalement = = un livre pouvant demeurer dans ta bibliothèque des années durant sans être une seule fois ouvert & cependant te nourrir ou te donner à penser à vie) (voilà : c’est ça : un livre qui serait pour toi comme un guide pratique ou un tuto aussi pratique qu’un guide pratique ou un tuto sur le net pour changer les joints d’un robinet modèle extra neuf n’arrêtant pas de fuir) un livre intensément pratique t’expliquant sans t’expliquer comment utiliser intensément la force & la puissance des textes des autres (écrits par d’autres) pour – P_A_N ! – booster à mort tes propres textes = = comme si tu savais (& acceptait enfin) que (toi) (toi toi) il ne te sera possible d’écrire quelque chose qu’en ingurgitant les autres = = qu’en devenant anthropophage = = qu’en assumant le fait qu’il ne te sera possible d’écrire qu’en n’étant que ça : un anthropophage = = un bouffeur de mots = = un remixer (naissance – dans ta tête = = rien que pour toi – du concept de « littérature anthropophage »)
Des Westerns : le goût (très jeune) des chevauchées & des destins tendus comme des arcs électriques (partant sans faille & sans fléchir) d’un point A à un point B tu le retrouveras plus tard (ailleurs) dans de la vieille littérature (dans les sagas islandaises) & ce sera un bonheur fou de retrouver (intact) dans les sagas islandaises le plaisir fou de se laisser emporter dans une narration qui galope & ne s’embarrasse pas de psychologie à deux balles (ou quelque chose du genre)
De Michaux : lisant & relisant (toi) régulièrement (à l’époque) toujours ce même livre (un machin chose à la fois réaliste) (à portée de main) (sous le coude) (& onirique) écrit dans une langue à ta portée (enfin du simple !) mais t’expédiant (toi & ton mental) sur orbite (sans chichis ni manières = = te faisant entrer dans des zones mentales que tu ne soupçonnais pas) (comme si ton esprit – P_A_N ! – d’un coup s’agrandissait) (ou prenait conscience que – O_U_I ! – le fantastique existe en vrai) (ouvre juste ton œil mon gars) (ouvre juste ton oreille) (regarde & vois) (entends) (t’as des yeux non ?) (t’as des oreilles non ?) (au point tout de même – il faut le dire – de ne plus être des fois (à l’époque) en phase avec (disons) les êtres & les choses qui t’entourent) (tout de même) (comme quoi ça peut mener loin la lecture) (pas vrai ?)
De Savitzkaya : tu ne sais pas comment (pas envie de savoir) tu ne sais pas pourquoi (pas envie d’explorer la chose) à une époque (tu le sais) (c’est inscrit en toi) (définitivement en toi) tu enchaînes ses livres dans une boulimie de lecture (toujours le soir) (toujours dans ton lit & rien que) jusqu’à tard dans la nuit (comme si ne comptait plus – pour toi – (à cette époque) que l’enchaînement sans fin de ses livres & tu sais que ça (ça ça) (cet enchaînement de livres) ça a (à cette époque) sauver ta vie (rien de moins)
D’Homère : le bruit & la fureur, la force brutale & intégrale d’Homère intégrée (P_A_N !) d’un coup (d’une seule fois) en raison d’un arrêt forcé (ton cuerpo lâchant soudainement prise) (ton cuerpo (P_A_N !) te forçant à : rester des semaines couché à te tourner les pouces (n’ayant rien d’autre à faire) (& ne pouvant rien faire d’autre) (que lire) (& écrire un peu) (mais surtout lire) (& pourquoi pas cette vieille chose (cette sauvagerie) (splendide) qui – jusqu’alors – t’était tombée des mains (faute de temps) (faute d’ingurgiter l’affaire en une fois) (sans être interrompu par : les aléas de la vie) (les factures à payer) (les courses & la vaisselle à faire) (etc.) = = comme s’il ne t’avait été (à toi) (toi toi) possible d’ingurgiter une telle sauvagerie qu’en y plongeant intensément d’une traîte (sans répondre au téléphone & en désespérant d’un jour ressortir à l’air libre sans faire gaffe à ton cuerpo fragile & out pour un bon bout de temps)
(Je relis ce que je viens d’écrire & je constate : pas de femmes dans l’affaire. Pas de femmes dans la matrice. N’en connaissais pas à l’époque quand tout ceci – la matrice – s’est mis en place. Elles viendront pourtant mais plus tard. Elles compteront pourtant mais plus tard. Les Azam. Wittig. Vazquez. Von Bingen. Duras. Sarraute. Etc. Voilà. C’est ainsi. Ça me laisse perplexe. Ça en dit long. Très long. Je suis comme tout le monde le fruit de mon époque. J’en prends acte. Ne peux que faire cela : en prendre acte. Le déplorer & en prendre acte.)
Héhéhéhhéhé, te (re)connais bien là! Bises camarade!
C’est écrit et c’est beau à lire. Aussi… je ne connais pas Verheggen, je ne connais pas Saer, je ne connais pas Savitzkaya ni Noon. Alors je vais aller voir ce qui te fait écrire si fort. Merci et bonne journée.
Le Noon, c’est « Cobralingus » mais je ne crois pas qu’il ait été traduit en français, contrairement à ses romans (« Cobralingus » n’est pas un roman, en fait, mais une espèce de « boîte à outils » bien barrée et tu n’as pas besoin de comprendre l’anglais pour le « lire » ! J’adore ce livre ! Grand grand grand merci pour ta lecture, Louise ! Je t’embrasse et belle fin d’après-midi !
Sacrée bande en fait, du minimalisme aux borborygmes inquiétants, de la plume fine au gourdin remuant la fange. Youpi! je ne connais pas Saer. Je vais fouiller!
Saer, c’est l’auteur, entre autres, de « Glose » et de « L’ancêtre », reparus, il y a quelques années à peine, au Tripode. « Glose » est un très très grand livre (à mon sens, du moins !)… Merci de ta lecture, amigo !
Ça envoie toute cette mythologie personnelle. Et puis tu as les mots pour la dire ! Je vais courir me procurer Glose et l’ancêtre de Saer ! Merci Vincent. Je te découvre j’irai te lire
a bin c’est que cette mythologie perso me colle littéralement à la peau ! haha ! et, du coup, oui, j’aime la dire, la donner en partage ! Par goût perso, je penche plus vers « Glose » mais « L’ancêtre » est excellent aussi ! Merci, Camille, d’avoir pris le temps de lire tout cela ! Je t’embrasse
Les Westerns, c’est la classe ! Et pour y pomper des choses, on pourrait paraphraser en disant que : « Quand on écrit, on ne raconte pas sa vie ». https://www.youtube.com/watch?v=pwKad5Jb5P4
Haha ! Exactement ! Merci pour cette paraphrase ! Ça me donne envie de regarder une fois de plus ce sacré bon film ! Haha ! Biz à toi ! J’espère que l’été t’est bon, malgré la pluie !
Enthousiasme très communicatif ! je viens d’acheter Glose…
Haha ! Je croise les doigts pour que Glose vous soit une belle et bonne expérience de lecture ! Content, en tout cas, que quelque chose de la passion pour ces auteurs et leurs livres passe auprès des lectrices et lecteurs de cette « matrice » ! Merci à vous pour le retour, Muriel !
Rétroliens : #L5 PODOLSKI REMIX (matrice n°2) – Tiers Livre, explorations écriture