De L’Amant de Marguerite Duras où la fiction titille le réel dans cette prose sèche et sobre où seuls comptent l’image, la mémoire et le désir dans la chaleur et le mystère de l’Indochine.
De Dora Bruder de Patrick Modiano ou l’art du récit d’enquête en creux, ou l’art du détail, du goutte à goutte, des questions sans réponse, où les repères temporels perdent le lecteur dans les méandres de la réflexion du narrateur, où les adresses, les numéros de téléphone, les photos, les rapports seuls attestent d’une existence, sinon vouée à l’oubli ?
Du Joueur de tango de Christoph Hein qui, par ce récit sans fioriture, pareil à un journal de bord bien que dit à la troisième personne, donne à voir, dans une Allemagne de l’Est d’avant la chute du mur, grise et monotone, le désœuvrement d’un homme que deux années de prison ont rendu inapte à la liberté ou plutôt la vie à l’extérieur comme ils disent et nostalgique de la sécurité et de la déresponsabilitsation du milieu carcéral et te fait te questionner sur l’absurdité et, accessoirement, sur le pourquoi de ton attrait pour cette Allemagne-là.
Du Hussard sur le toit de Jean Giono, un titre qui a lui seul fait rêver, ou le récit des aventures d’un jeune et beau colonel de hussards piémontais, preux et romantique à souhait, inoubliable au cinéma sous les traits d’Oliver Martinez, et de sa lutte contre le choléra dans une Provence rêvée et de ce fait idéale, de son amour chaste pour la belle Pauline ou Juliette Binoche, mariage réussi entre littérature et cinéma, et qui plus est, pur bonheur, Balzac n’est pas loin.
De La Promesse de l’aube de Romain Gary, autre pépite de réel teintée d’autofiction finement taillée et ciselée qui transporte au profond d’un homme qui s’est construit autour des rêves de sa mère, mais s’est bâti sa propre légende, récit où l’on explore l’amour maternel à outrance et la tentative d’y survivre, se disant qu’on l’a échappé belle.
D’Un monde sans rivage d’Hélène Gaudy ou le livre parfait, le livre que j’aurais voulu écrire, que je rêve d’écrire, encore une fois le réel, les quelques informations glanées, les photos qui ouvrent l’imaginaire et l’écrit qui comble les creux, les déplis qu’ils permettent, les vies qu’ils ressuscitent.
De L’Affaire Lapérouse de Anne-James Chaton où Lapérouse n’est pas tant le propos que les possibilités qu’ouvre l’affaire, dans un récit d’enquête magnifié et porté à son comble par la fiction des hypothèses, du jeu de la langue, celle qui s’écrit et celle qui malaxe, roule, tourne dans la bouche, et se dit, se scande pour n’être plus que son, rythme, sonorité.
De L’Acacia de Claude Simon, lu il y a trente ans, prose immense, débordante, frémissante, ressentie jusqu’au bout des ongles, avouer maintenant que souvent tu ne lis pas dans ta tête, tu lis en remuant les lèvres, en disant les mots tout bas, ce besoin de vivre les mots et les phrases, les malaxer dans ta bouche, les sentir vibrer dans ton corps entier. A relire d’urgence.
A suivre….
grâce à vous envie de découvrir Anne-James Chaton et le livre Un monde sans rivage d’Hélène Gaudy Merci