De Carlotta intorno al mondo et ces mots de la mélancolie, dite, enfin, ces mots qui brisent les frontières et amènent loin, autour de la planète, à la découverte. Cette lecture avec maman et Megaloto, personnage devenu réel et qui vit avec nous.
De Favole al telefono de Gianni Rodari, l’écriture au bout du fil, d’un père à son enfant, cette lecture encore à voix haute, de papa, de maman parfois, et nous qui plongions dans ce monde de lettres, d’erreurs, ce monde en chocolat, ce monde de glace, ce mondes de petits bonhommes étranges, d’un papa en voyage d’affaire. Ce temps du soir.
De Orlando de Virginia, Virginia, Virginia, Virgo ou Terre d’Amérique, Louve surtout, Virginia Woolf et ces temps de lecture en anglais à 20 ans, He, for there was no doubt he was a men though the fashion of the time did something to disguise it, lire et apprendre par cœur. Orlando, son pouvoir, tout son pouvoir. Son pouvoir de personnage, tout ce monde qui s’ouvre de manière inédite, cette possibilité de traverser les frontières du temps, de l’espace, le frontière de ses vêtements, de son corps, ce pouvoir enfin fantastique, enfin retrouvé. Et retrouver par la suite l’incipit exact avec le même émerveillement de ces mots shakespeariens, He — for there could be no doubt of his sex, though the fashion of the time did something to disguise it — was in the act of slicing at the head of a Moor which swung from the rafters.
Et puis de To the lighthouse, et cette navigation lente de la langue vers cette île dans le brouhaha du discours la vie intime et familiale, cette passion qui reste maintenant pour les phares.
De la Comedia de Dante, ces mots ronds, ces mots médiévaux, enchaînés, enchaînant, ces mots enivrant qui se précipitent en toi et si configgono dentro, cette langue des langues d’Europe, à travers ses forêts obscurs, la forêt obscure de la langue, les descentes et les précipices de la langue, le lac glacé de la langue, les cieux de lumière de la langue. Oui comment la parole peut devenir la forêt la plus obscure, la nuit la plus profonde, la flamme la plus brûlante, comment la langue peut scricchiolare, gemire et la lumière de la langue squarciare il mondo.
De Jane Eyre de Charlotte Brown, lu dans un fauteuil rouge style anglais, ce livre qui plonge au-delà des apparences, ce livre du récit, de l’intrigue, de la narration, de la suspense, ce livre des personnages. Tour cela pour voir ce monstre qui habite chez nous, avec toi à 12 ans, toi qui frôles la terreur.
De Cassandra de Christa Woolf, paroles denses, paragraphes denses, subjectivité de femme. Texte qui m’amène à écrire. A la piscine Bellariva, Firenze.
Du Traité des passions de l’âme de Antonio Lobo Antunes, cette sensation que c’est ça la littérature, voyager dans les âmes, dans les stratosphères de l’âme, la perception que tout ce qui se passe devienne d’un coup visible par les mots et c’est difficile de suivre ce qui arrive et de lire. La complexité et les mots qui suivent les psychés, la revanche du travail et de la classe ouvrière, tout si délicatement, si délicatement dit, pli par pli.
D’Anna et le Gorille d’Anthony Brown, là où le dessin parle secrètement et les mots suivent le dessin, suivent le secret, là où le Gorille prend forme la nuit et il t’accompagne pour un tour de walzer.
De Forse un mattino andando in un’aria di vetro d’Eugenio Montale et de tout Montale, ce miracle au milieu du rien, possible, peut-être, la force de ce peut-être et de cette lumière en verre, tout ces verres qui s’ammonticchiano nei suoi testi, ces éclats de verres, éclats des mots, cet éclatement du monde.
De S’io fossi foco de Cecco Angiolieri, ces mots de feu qui brûlent, ces paroles qui renversent, jusqu’au père, la rage de la poésie et la révolution.
D’Ecrire de Marguerite Duras, cet avancement au pas du réel, au pas de soi-même. L’autorisation que c’est ça l’écriture. Ce rien du monde.
De la Plage de Kafka de Murakami là où les mots s’avancent dans l’invisible des rencontres de nos âmes, là où la séparation est impossible et l’aventure infinie, pendant que nous n’en apercevons que des traces, des bribes, des restes, dans nos vies somnolentes.
De la Plage de Kafka de Murakami là où les mots s’avancent dans l’invisible des rencontres de nos âmes, là où la séparation est impossible et l’aventure infinie, pendant que nous n’en apercevons que des traces, des bribes, des restes, dans nos vies somnolentes.