Les ondes murmurées par les couloirs de l’hôtel lui sont imperceptibles — Elle ne sait pas ce qu’elles murmurent — Des incantations minuscules — Des soupirs de connivences adultères — Quelques délires insoupçonnés de voyages à rêver — Quelques résonances — D’un mur à l’autre des rebonds d’amertumes survivantes — Spectres de représentants de commerce — Des traces de sommeils lourds, mauvais, agités, vifs, superficiels — Pénibles digestions cérébrales — Ruminations confidentielles — Elle ne sait pas ces murmures d’ondes — Elle s’est endormie très vite — Surtout, ne pas rêver — Sa chambre dont elle ne sait rien est de celles qu’on oublie — Hier encore et naguère la chambre utile et partagée — Ne pas imprimer le souvenir — Chez quiconque l’occupe — Sa caractéristique première — Ne pas imprimer les mémoires de passage — Une chambre qui voit passer tant d’inintérêts sûrs d’eux-mêmes — Sa chambre semblable aux autres — Recevoir les destins incongrus — Accumuler les « quelqu’uns » de piètre importance — De cela elle ne sait rien — Se prendre de sommeil dans une de ces chambres — Elle se repose — Sans savoir ce qui dans ces pièces est advenu — Tout ce fatras d’insignifiance — Qui fait hôtel — Ne rien savoir de cet hôtel — Qui l’a placé là — Comment le propriétaire a voulu un perron — Faire une entrée surélevée — Donner du chic — Un comptoir de teck — Dieu sait quel âge — Quelle ambition première — Hôtel — Rescousse à prix abordable — Havre où se loger pour quelques nuits — Pour quelques heures — Une bâtisse nécessaire — Comme d’autres — C’est pour ça qu’il a été construit — Il n’a pas eu son heure de gloire — Mais elle ne le sait pas — Passagère épuisée du bâtiment — L’hôtel vers où convergent toutes traces — Où des personnes ont repris des forces — D’autres en ont perdu — Accueillir des amours transitoires et pressés — Attirer les voyageurs égarés — Avec sa pancarte délibérément incrustée dans l’enduit — L’hôtel a sa place choisie — Elle n’a pas idée des ambitions qui ont présidé à l’érection de ce dispositif — Elle dort profondément et ne sait pas — Elle n’entend plus les bruits creusés — Descendre les rideaux de fer des boutiques — Chaque boutiquier veillant — L’un à ses salaisons — L’autre à sa quincaille — Elle ne connaît pas le contenu des échoppes — Pas eu le temps — Déjà trop tard — À son arrivée les vitrines s’allumaient — Elle n’a fait qu’entrevoir — Elle a entendu vaguement — S’amenuiser le brouhaha — En entonnoir vers le centre et la fontaine — Elle ne connaît pas cette fontaine — Bien qu’elle s’y soit rafraîchie tout à l’heure — Un point d’eau ancien — Dix-septième siècle rénové dix-neuvième — Le même maçon que celui du perron de l’hôtel — Orientée selon les points cardinaux — Quatre jets — Des figures allégoriques en bas-relief — Couler doucement — Leur eau claire — Elle ne sait pas si elle est potable — Bien qu’elle en ait bu — Un peu — Maintenant on peut entendre le son. L’eau claire dans le bassin — Mais pas elle — Qui dort lourdement — Le bassin au centre de la place — Elle ignore presque tout de cette place — Elle ne comprend pas sa position — En fonction des rues qui débouchent — Elle est arrivée par le hasard de ses pas — Traînants — Ne pas connaître le plan de cette ville — Toute petite ville — Ne sait pas s’il se trouve d’autres places — Elle a seulement aperçu des montagnes — Par l’ouverture des rues — Rasées par le soleil encore chaud
a bin, moi, ça me plaît, ce retour, cette ignorance crasse dans laquelle, dans le fond, on se trouve toutes et tous quand on est jeté dans le monde ! et puis cette « voix », par-dessus, qui la raconte, elle, endormie, et qui « lit » comme dans sa tête, qui sait tout d’elle (en tout cas, perso, en tant que lecteur, c’est le « cinéma » que je me fais) et qui sait tout de ce qu’elle ignore : c’est splendide, moi je dis ! merci merci de foncer ainsi comme tu le fais ! je bénis Fil Berger d’avoir convaincu Fil Berger d’être de retour dans ces ateliers ! haha ! à tout vite, amigo !
Merci, Vincent pour ce commentaire qui me va droit au cœur !
Ce bout de texte vient tout juste d’être écrit cet après-midi.
Je ne prend qu’à peine le temps de me relire et je publie. À fond la caisse, donc. Une course contre la montre !!
Je t’embrasse fort !
moi aussi je vote pour !
Bonjour, Caroline !
Un grand merci pour votre lecture !
Ah ouais, intéressant cette progression fragmentaires et par à-coups, des sautes d’idées, de ressentis, des tensions, des espaces à imaginer.. Merci!
Merci, Gauthier !
Votre commentaire me touche et m’encourage !