Je me suis réveillée avant le lever du soleil. J’ai nourri les poules et les chats, j’ai pris mon petit déjeuner et fait ma toilette. Le ciel est blanc et assise derrière la fenêtre du salon, j’attends de voir passer les voisins. Je sais comment ils m’appellent : la vieille dame aux chats, parfois ils simplifient m’appelant la vieille aux chats. Je ne me vexe pas. Je suis vieille et je nourris douze chats qui vont et viennent comme ils veulent. Ils sont libres. Un seul d’entre eux monte sur mes genoux. Je caresse son épais pelage roux à cet instant, il ronronne et s’amuse à regarder lui aussi à travers la fenêtre. Certains diraient que je les surveille, que j’épie. J’ai gardé cette habitude vieille de trente ans, ne dit-on pas que les vieilles habitudes sont tenaces ? Hier j’ai vu une jeune fille quitter la maison de la voisine, je ne l’avais jamais vue auparavant et je la vois maintenant apparaître au coin de la rue. Elle s’arrête devant mon jardin comme elle l’a fait hier. Cherche-t-elle mon regard ? Je voudrais ne pas exister, regarder sans me laisser apercevoir. Je retiens ma respiration pour ne pas déplacer les rideaux.
Je me suis réveillée avant le lever du soleil, je ne ferme jamais les volets de ma chambre. J’ai nourri les poules et les chats qui tournaient autour de moi en miaulant avant de prendre mon petit-déjeuner. Toujours le même rituel, chausser les sabots, ouvrir la porte grillagée du poulailler, verser le grain, regarder la poussière se soulever, caresser les chats un à un à l’exception du petit noir qui reste à l’écart, remplir les gamelles, et au retour dans la cuisine, sentir l’odeur du café juste passé. Puis le cabinet de toilette, à peine chauffé où la peinture se craquelle d’humidité. Ce matin, le ciel est blanc et, assise à la fenêtre du salon, un châle sur les épaules, j’attends les premiers passants. Il y aura l’apprenti du boulanger, pressé, les voisins partant au bureau, les écoliers puis le facteur qui ne s’arrête plus. Je sais comment ils m’appellent tous : la vieille dame aux chats, ou la veille aux chats. Je ne me vexe pas, je suis vieille et je nourris les chats du quartier. Un seul d’entre eux rentre dans la maison et monte sur mes genoux. Je caresse son épais pelage roux, il ronronne et s’amuse à regarder la rue avec moi. Parfois il suit du regard des formes invisibles, les yeux écarquillés. J’abrite de nombreux fantômes. Je passe la matinée derrière ma fenêtre, ils me voient parfois lorsque je n’abaisse pas assez rapidement le coin du rideau. Certains diraient que je les surveille, que je les épie. J’ai gardé cette habitude vieille de trente ans, ne dit-on pas que les vieilles habitudes sont tenaces ? C’était une autre époque, plus sombre. Je vois maintenant apparaître la jeune fille que j’avais vue sortir de la maison voisine hier. Que vient-elle faire chez Augustine ? Pourquoi scrute-t-elle le jardinet devant la maison ? Je retiens ma respiration pour ne pas dévoiler ma présence.
Je me suis réveillé avant le lever du soleil. J’ai nourri les poules et les chats qui tournaient autour de moi en miaulant et cherchant des caresses. Chaque matin le même rituel, chausser les sabots, ouvrir la porte grillagée du poulailler, verser le grain, regarder la poussière se soulever, caresser les chats un à un à l’exception du petit noir qui reste à l’écart, remplir les gamelles et, au retour dans la cuisine, sentir l’odeur du café juste passé. Puis le cabinet de toilette à peine chauffé où la peinture se craquelle d’humidité. Ce matin, le ciel est blanc et, assise à la fenêtre du salon, un châle sur les épaules, j’attends les premiers passants. Il y aura l’apprenti du boulanger, toujours en retard, les voisins partant au bureau d’un pas pressé, les écoliers bruyants puis le facteur qui ne s’arrête plus. Ils aperçoivent parfois mon ombre derrière le rideau. Certains diraient que je les surveille, que je les épie. J’ai gardé cette habitude vieille de trente ans, ne dit-on pas que les vieilles habitudes sont tenaces ? Ils m’appellent la vieille dame aux chats, ou la veille aux chats. Je ne me vexe pas, je suis vieille et je nourris les chats du quartier. Un seul d’entre eux rentre dans la maison et monte sur mes genoux. Il ronronne avec force lorsque je caresse son épais pelage roux, et poursuit de ses yeux écarquillés les formes invisibles déambulant dans la pièce. J’abrite de nombreuses présences aux paroles muettes. Leurs photographies accrochées au mur m’en rappelle le souvenir. Souvenirs d’une autre époque, plus sombre. Je vois maintenant apparaître la jeune fille que j’avais vue sortir de la maison voisine hier. Elle scrute mon jardin et je retiens ma respiration pour ne pas dévoiler ma présence. Elle a quelque chose de familier. Les reflets de ses cheveux ? Son regard ? Oui… Son regard.
Recopie à la main du texte dactylographié sur une feuille de cahier. A la recopie, déjà, un besoin de modifier le vocabulaire, enlever des ponctuations, compléter. Se questionner sur le « JE » : une demande de la proposition ?
Prendre une pause avant d’écrire la nouvelle version. Comment s’appelle-t-elle ? Qui est-elle ? Ce personnage n’existait pas avant la proposition #3 faire un livre. Le personnage extérieur s’invite.
Elle se dessine doucement, Madeleine. Est-ce elle qui, derrière sa fenêtre, voit tout. Narratrice principale. Comment l’être, immobile derrière la fenêtre ? Comment peut-elle tout voir ?