Le réel t’écrase comme un bloc de pierre, une chape de béton dans une mer de béton.
À faire des gestes de béton.
Que faire de ce faire et de la préposition qui accompagne ? Qui est-il ce personnage fait de béton ? Un personnage de la maison, non pas en béton mais faisant des gestes de béton, c’est-à-dire enlisé, englué, embourbé dans un quotidien qui fracasse et qui sclérose toute issue de vivre. Terrible matière le béton ? Pas si sûr…
À faire des gestes de béton.
Le béton est un assemblage de matériaux de nature généralement minérale. Mais de quelle nature sont des gestes de béton ? Car tout se joue dans cette compacité, dans cette tension (de l’infinitif) employée comme liant. Comme béton de faire.
À faire des gestes de béton.
Tout s’est figé dans le béton. Mémoires passées au tamis d’injection du mortier. Et se dire une fois encore : c’est toujours quand on commence à pouvoir les nommer que les choses disparaissent.
À faire des gestes de béton.
Qu’est cette phrase sans le corps du texte qui l’enserre ? Quand les gestes de béton qui se formaient dans les bas-fonds deviennent des mots, une phrase justement, et échouent sur la page, dans la bouche. Toute seule cette phrase – ce béton – prend possession de la page, de la bouche et du cœur. Elle pèse son poids cette phrase, sans quoi elle ne serait pas tracée sur un post-it.
À faire des gestes de béton.
Enjamber cette phrase comme un soubassement. Socle sur lequel reposent les strates minérales des phrases à venir, ouvrage de brique ou de béton. Souvenirs de personnages affreux et froids. Enfermés dans ce qui pouvait être de la pierre, pour ensuite supporter la matière rugueuse et givrée du béton. D’autres gestes encore à écrire. À faire par intermittences. Et peut-être buter dans du gravier en essayant d’enjamber le mur qu’est cette phrase.
À faire des gestes de béton.
L’important serait de garder cette phrase secrète, comme une flasque au fond des poches. De toute façon ces phrases-là ne s’expliquent pas. Il faudrait toujours avoir le verbe sur le bout de la langue.
souvenir de «Béton armé», le livre du vieux pote Philippe Rahmy…
Ah je ne connais pas ce livre mais je vais aller y jeter un œil histoire de cimenter tout ça ! Merci d’être passé par là François. Pas certain d’avoir embrassé ta consigne mais bon …
Tes recherches sont intéressantes, tu interroges, tu explores, tu supposes. J’aime bien cette quête en direct avec le lecteur.
Merci JLuc pour ton retour. En effet j’ai essayé de tourner autour de cette phrase pour comprendre avec le lecteur (et le personnage qui porte ces interrogations) d’où pouvait bien venir cette phrase. Pas évident car vertigineux…
… à faire des gestes de béton – la phrase qui creuse mais dont on sait pourtant qu’elle est le trésor qu’on veut garder dans la poche pour la creuser encore…
Oui elle creuse au dedans un des personnages cette phrase, autant qu’elle en sclérose un autre. On va essayer de pousser encore un peu ce petit laboratoire de la phrase dans le pdf. Histoire de voir jusqu’où ça peut mener une phrase qu’on garde au fond de sa poche…
Merci Camille, très joli ces nuances autour de la phrase et du béton.
Merci surtout à toi Clarence pour ton retour ! J’ai essayé de tricoter quelque chose avec cette consigne même si je ne suis pas certain d’être parvenu à complètement embrasser ce que François avait en tête… Je vais quand même tenter d’en faire quelque chose pour le pdf.