C’est dans la grange qu’il y a ce qu’il y a, c’est écrit. C’est. Partout c’est. Cela est. Ici – dans la grange – et maintenant, c’est. C’est deux fois : ici et maintenant dans la grange, c’est ; écrit c’est. C’est écrit. Pourquoi écrire que c’est écrit ? C’est dans la grange qu’il y a ce qu’il y a, ça devrait suffire, c’est déjà écrit, mais la phrase a besoin d’écrire que c’est écrit, alors qu’elle n’écrit rien : il y a quoi ? ce qu’il y a. C’est. Il y a. Verbes rétrécis, répétition acharnée d’une affirmation vide. C’est. Il y a. C’est tout. Il y a quoi ? Il y a ce qu’il y a. Il y a quoi où ? Dans la grange, il y a ce qu’il y a. C’est où qu’il y a ce qu’il y a ? C’est dans la grange qu’il y a ce qu’il y a. Comment le sais-tu ? C’est écrit. C’est dans la grange qu’il y a ce qu’il y a, c’est écrit. C’est tout. C’est simple. C’est vide. C’est. Il y a. Les gommer, les souligner en rouge, trop de c’est, trop d’il y a, ce n’est pas comme cela qu’on écrit. Pourtant, c’est écrit. C’est écrit comme ça : c’est dans la grange qu’il y a ce qu’il y a, c’est écrit. Un autre livre avec des c’est et avec des il y a, un livre dont le titre est Écrire : « Vauville. C’est là. C’est le mot sur le panonceau. » C’est écrit (les doigts avaient écrit c’écrit, il y a tant à écrire sur ce qui s’écrit malgré ce qui voudrait s’écrire). C’est là. Où ? C’est dans la grange. Quoi ? Qu’il y a ce qu’il y a. Ce, c’est quoi ? Ce, c’est ce qu’il y a. C’est tout ? C’est écrit. C’est écrit où ? C’est là, c’est écrit là, c’est dans cette phrase-là que c’est écrit, mais c’est pour que d’autres phrases s’écrivent que cette phrase-là s’est écrite, c’est pour cela que cette phrase n’écrit à proprement parler – écrire, c’est refuser de parler proprement – rien. C’est pour laisser à d’autres phrases, c’est pour laisser à tout un livre, le soin d’écrire ce que c’est que ce il y a qu’il y a là, dans la grange, et si c’est écrit, c’est pour que s’écrive ensuite ce qui s’écrira. C’est dans la grange qu’il y a ce qu’il y a, c’est écrit. C’est dans ce livre que c’est écrit. C’est ce livre qui s’écrit. C’écrit la grange qu’il y a et ce qu’il y a dans la grange qu’il y a. C’est dans la grange qu’il y a ce qu’il y a, c’est écrit. Phrase rassurante : c’est déjà écrit. C’est là. C’est le mot sur le panonceau. C’est écrit. C’est. Il y a. Le livre est. Ce, c’est le livre. Il y a, c’est le livre. La grange, c’est le livre. Le livre, c’est la grange. C’est dans le livre qu’il y a ce qu’il y a, c’est écrit.
vertige, ritournelle, chanson, chanson, vertige, ritournelle. J’avais mis la L12 de côté, grâce à ce texte je re-hésite. Merci
Merci Lisa, j’aime cette idée de vertige et de ritournelle. Aucune hésitation à avoir : la L12 est une étape passionnante dans l’écriture du livre.
Pour ma part, cette phrase me fait penser à une phrase d’enfant, et à des histoires de vieux grimoires. C’est dans la grange qu’il y a ce qu’il y a, on ne le nomme pas, c’est sacré, c’est mystérieux, c’est le monstre dont on doit taire le nom, ou l’épopée à venir… C’est écrit, c’est le temps du mythe, c’est déjà écrit, c’est déjà vécu, et on ne fera que le revivre à l’infini. Attention départ.
Merci pour cette interprétation très riche de ma phrase. Il se trouve que l’enfant est un personnage essentiel du livre en cours d’écriture et qu’en effet il y a quelque chose comme une quête ou comme une épopée dans ce que j’essaie d’écrire.