Et ça coule dans la fontaine du lavoir. Ca coule et ça fuite et ça s’enfuit. C’est la fuite des sens, de l’essence de la vie, de l’existentialisme qui n’est plus la panacée de la vie. Il faut de l’existentiel dans ce ciel plein de fuite. Et ça coule, ça s’écroule dans ces fariboules et ses fariboles où on se gondole. Ah, ça glougloute à la fontaine, ça fait un sacré bruit de chiotte, de canard WC qu’on a trop canardé ou bazardé dans les égouts. Ca coule, ça s’écoule, ça s’écroule, tout coule dans cette maison où il n’y a plus de joints. Il n’y a plus de jointure dans cette architecture. Ca se lézarde, tout se lézarde à cause de la sécheresse et des fuites en avant des bruits de chiotte qui dégouttent même les passants. Oui, ces bruits de fond de chiotte qui dégouttent du nid et se remettent dans le lit de la souris qui s’enfuit vers ce qui se délite, se délite dans le lit des mandibules. Oui, des mandibules. Parfaitement madame, parfaitement monsieur ! Des mandibules bleues qui mastiquent et recrachent les mots comme si c’était du plastique alors que ce sont des diamants. Oui, les mots sont des diamants, monsieur, et pas des amants qui finissent au pieu.
Les mots sont des diamants que l’on se met aux joues, dans ces boucles d’oreille qui tiennent avec des boucles et des clous dedans. Les mots tiennent avec des boucles et des clous dedans. Et moi, j’aime ces boucles. C’est ma vieille cousine Simonne qui me les s offertes. Pour mes quarante ans. Ce sont des diamants bleus. Enfin pas tout à fait mais c’est tout comme. C’est tout aussi joli, et ça va bien avec mes yeux bleus.
C’est pour ça que j’écris. Pour avoir des diamants bleus sur mes lettres, dans mes carnets, sur mon mobile et sur mon ordinateur. A force d’avoir des lettres et des mots, j’ai des diamants bleus partout, et j’en mets jusque dans mes trous de nez. Je ne peux plus les sentir car j’ai perdu l’odorat à cause de la Covid, et j’ai perdu le goût aussi. Mais les mots ont plus de saveur et d’odeur que tous ces égarements dus à la déréliction du monde, au grand chambardement d’une société qui est en train de s’effondrer.
Pour changer le monde, il faut des mots. Mettre des mots sur ce que l’on veut qui change. Pas des images, non ça on n’a pas le droit car il y a des droits à l’image, mais mettons des mots à l’endroit et à l’envers pour faire des poèmes qui mettront le monde à l’envers et à tes pieds. Oui, le monde à tes pieds comme tu as la goutte au nez. Après tout c’est l’hiver, et tu as la goutte au nez comme promis.