Assis dans le fauteuil jambes repliées sous lui, Rémi lit son magazine. Il aurait bien aimé travailler auprès de chevaux. Il aurait aimé les brosser. Vous ne le savez pas mais il occupe un emploi de manutention. Il emballe toutes sortes d’objets fabriqués pour la coiffure et notamment des perruques. Les fils sont synthétiques et de bonne qualité, d’ailleurs ils paraissent plus vrais que nature ces faux cheveux. Rémi les enveloppe dans du joli papier froissé comme pour des bonbons avant de les déposer précautionneusement dans de grands cartons bruns. Ils ne sait pas où elles partent après. Toucher ces perruques lui plaît. C’est bizarre comme sensation dit-il. Un jour, il en a essayé une mais cela lui a moins plu car il ne s’est pas reconnu. Mon visage était dessous dit-il.
Cet essayage, c’était il y a quelques mois et c’est depuis, lui semble-t-il, que dans la paume de sa main droite, au beau milieu, lui pousse un poil dru comme du crin mais doux comme un duvet et qu’il coupe régulièrement. A chaque repousse, une longueur de plus. Ça le fait sourire. Il dit : toujours à se caresser, toujours à sourire. Il apprend à le torsader d’une main et le tient secret. Pour le moment, c’est possible.