Villette 1
Les strates des publicités anciennes, une coupe longitudinale de temps publicitaire, soldes, spectacles, produits, incorporée dans la faïence de la galerie du métropolitain, l’intérieur d’un boyau en écailles débouchant tantôt plus bas tantôt plus haut, jusqu’à sortir à l’air libre, prendre escalator, essor et structure métallique, découpant à l’emporte pièce immeubles et rues, hachant magasins et passants, déchirant les perspectives, cousant des lambeaux de ville dessus et dessous.
Villette 2
Une place-plage vague et vaste crissante de sable, carrière pour chevaux défunts, chevaux fantômes des bouchers des halles de la Villette traversant les blocs rouges, cubes de chair en plastique posés sur la pelouse par un enfant géant, sur la pelouse des halles de la Villette où des fourmis humaines pique-niquent aux abords de l’auditorium, encore un jouet pour le fils de géant, à moins que ce ne soit une concrétion de trou noir, un aspirateur à fourmis, un pavillon d’oreille en métal fondu, une conque carrée et gigantesque, un mirage acoustique.
Villette 3
Pas d’espace stable où poser le regard, tout ou rien n’est propice à l’arrêt, les lignes fuient dans tous les sens, par tous les pores, et ne mènent à aucun endroit définitif, et celles de l’auditorium trop énormes et dysphoriques pour être saisies ; il faudrait trouver un point de vue surplombant mais le dernier étage est trop haut. Le bar donne sur le hall noir et la lumière naturelle derrière forme un rideau de fond douteux ; celle du film en 3D sur la fonte de la banquise, en accès libre dans l’entrée, donne bien plus une impression de réalité.
Villette 4
Lignes droites et courbes, flux, contre-flux, pont mobile, paysage qui veut suggérer l’infini des possibles, l’ubiquité fluide, mais ce n’est qu’illusion, il faut passer outre le panneau “zone de chantier/interdiction de circuler”, les rubans rayés blanc et rouge, les plots, les algeco, sauter le mur pour espérer rattraper la ligne que d’autres semblent avoir atteinte sans efforts (par quel GPS plus perfectionné ?) pour enfin pénétrer la Cité des Sciences.
Villette 5
Aux jeux pour enfants de la Folie, c’est un ballet d’arabesques, un circuit de rambardes en chrome, une jongle de trous, un mini-golf agrandi où les enfants roulent, jamais las de leur propre mouvement – les adultes statiques sur des chaises mi-longues inconfortables consultent leurs téléphones portables ou leurs livres, cherchent une image d’eux-mêmes, pris eux-aussi dans un flux d’informations, de messages, un chaos plus grand que celui des enfants, une folie contre leur folie.