Arrivé, on est arrivé parvenu quelque part atteint le bout du chemin c’est fini on n’a plus nulle part où aller on a été aussi loin que possible c’est fini même pour un pas de plus il n’y a pas la place au-delà de cet espace c’est le vide on est au bord du vide un pas de plus et on est dans le vide difficile de concevoir le vide et pourtant on y est ça y est le vide est là devant on a marché le sol avait cette consistance particulière de sol le pied pouvait s’appuyer dessus sans hésiter sans rien redouter il pouvait y avoir de l’imprévu on pouvait avancer mais là maintenant on est arrivé devant il n’y a rien il faudrait dire ce que c’est rien mais on ne peut pas on n’a pas les mots de ça le rien il y avait quelque chose et soudain il n’y a plus rien alors on dit qu’on est arrivé est-ce quelque part quand même ou bien doit on dire qu’on est nulle part est ce que nulle part c’est encore quelque part on doute d’être arrivé mais on ne sait pas comment appeler autrement ce qui arrive là maintenant il n’y a plus où aller et donc c’est la fin du parcours mais il n’y a plus rien on est là au bord de nulle part avec les mots de quelque part qui ne servent plus a rien qui ne permettent pas de dire où on est et parce qu’on ne peut pas le dire on se demande si c’est bien la que se trouve l’arrivée on pourrait tenter un pas de plus mais on voit bien que c’est impossible parce que c’est le bout de la route l’endroit où ça s’arrête et qu’ on est bien obligé de s’arrêter Il n’y a rien pourtant qui dit que c’est l’arrivée c’est juste un sentiment une constatation quand il n’y a plus rien c’est qu’on est parvenu au bout du voyage le mieux serait de se taire mais c’est plus fort que le néant la parole continue de parler l’injonction qu’on n’en parle plus ne sert à rien on voudrait en parler quand même dire qu’on est arrivé à rien mais on n’y arrive pas alors on répète les mêmes mots dans un ordre différent ou dans le même ordre des fois qu’il surgisse quelque chose de ce rien là mais il n’y a rien de particulier on est devant le rien pas devant un rien un petit rien un je ne sais quoi que le nom pourrait encore faire exister non on est arrivé parce que c’est ici que commence le vide le néant et ce qu’on ne sait pas c’est que ce néant là est encore quelque chose dont d’autres vont pouvoir s’ emparer pour faire quelque chose prendre un nouveau départ pour eux ce rien là va être le début du parcours ils vont avancer comme ça jusqu’à ce qu’ils arrivent quelque part qui sera leur nulle part à eux se demanderont si c’est bien là ce qu’on appelle arriver en parleront à leur tour ou quelqu’un en parlera comme d’un événement car c’est cela un évènement ce qui arrive mais celui qui arrive au bout peut on encore dire qu’il advient ou faut il dire qu’il est advenu à quel moment ce qui advient est-il advenu à quel moment celui qui arrive est-il arrivé suffit-il de dire qu’on est arrivé pour avoir la certitude du néant pourquoi en faire toute une histoire d’ailleurs ne vaudrait-il pas mieux se taire mettre un point final pour dire qu’on est bien arrivé mais le dire à qui à soi-même au vide qui reste beant là sans regard sans oreille pour entendre finalement n’était on pas arrivé dès le départ et si on en parle n’est ce pas pour poser les jalons qui mènent au rien le circonscrivent pour pouvoir le dire le délimiter c’est-à-dire tracer la frontière entre le tout du chemin et le rien de l’arrivée afin que chacun puisse refaire le chemin ou un autre chemin et dire à son tour qu’il est arrivé sans jamais pouvoir mettre un point final
ça alors, Christian, moi qui ne suis pas encore partie, j’ai le vertige!!!
« ce qu’on ne sait pas c’est que ce néant là est encore quelque chose que d’autres vont pouvoir s’en emparer pour faire quelque chose prendre un nouveau départ pour eux ce rien là va être le début du parcours »
le moudre des mots pour résister à l’impasse de l’arrivée – comme dit Mireille, vertige !