Pour le repos quotidien du corps vivant. Ring pour l’amour, la douleur et l’agonie. Pour les rêves, les cauchemars et les angoisses aussi. Mais pour le repos éternel du corps mort, plus besoin de son moelleux et de sa souplesse. Ce lapsus de l’écrire avec le « t » du matelot. Soi dormeur chahuté par la nuit. Le vieux Littré pour vérifier et lire qu’au temps de la question on l’a utilisé ce mot pour caractériser le dernier interrogatoire en présence du juge puisque les suppliciés, fraîchement torturés, étaient déposés dessus. Un peu plus tard, on emprisonnait, comme sandwich, les enragés entre deux pour les empêcher de mordre. Pas mal en sont morts étouffés, manière ainsi « d’abréger leurs souffrances ». Autrefois les pauvres, ils le bourraient de crin ou de varech et du peu de leurs économies si jamais. Les bourgeois eux, plutôt de la laine. On en change pas souvent dans une vie. Certains l’ont même perdue, leur vie, à cause de s’être endormis dessus, clope au bec. Dans le commerce des meubles ils disent « taux de renouvellement faible » alors, faire payer une bonne fois pour toutes. Quand certains se contentent d’un bout de carton, eux en vendent même des américains avec, comme des vaguelettes quand tu te retournes. Sinon, d’autres à ressorts ou en mousse, traités contre bestioles invisibles qui grattent et piquent, face hiver, face été – pas toujours faciles à distinguer – et même des à « mémoire de forme ». Mais tous, avec le temps, ils en prennent la trace et les fluides des corps qui s’allongent, s’épanchent dessus eux. Tournent grisaille. Et toute cette intimité pouilleuse d’auréoles délavées, épave à la rue, avachie, salie, souillée dans l’attente du camion des encombrants pour recyclage. Pas facile de s’en débarrasser de ce rebut usé de nos corps par les nuits et les jours de nos vies. Remonte alors d’un coup à la mémoire celui croisé au début de cet été, abandonné dans le vide d’une maison éventrée par catastrophe de l’automne dernier. La vie des anciens habitants suspendue depuis huit mois.
Codicille : d'abord pensé à objets du pays perdu : le char à bœuf bleu violet, la vieille cartouchière. Trop nostalgie. Prendre au plus proche. Casque audio ? Frites surgelées ? Masque chirurgical ? Voiture sport pétaradante du voisin ? Pas d'accroche sur la feuille. Et puis tiens, pris au quotidien, assez trivial et peu littéraire ? A l'écriture, ce lapsus de l'écrire avec le "t" des matelots qui rodent dans tes #L. Et puis, à tous les coups, il y en a qui moisissent dans les caves sanglantes de la Demeure. Remonte alors d'un coup à la mémoire, celui croisé au début de cet été, abandonné dans le vide d'une maison éventrée par catastrophe de l'automne dernier. La vie des anciens habitants comme figée depuis huit mois.
En faire quoi de nos codicilles ?
Codicille 2 : suite replay "zoom", vifs remerciements d'être passé ici. Pas pu faire autrement que tentative d'insérer un peu du codicille dans le texte principal. Cet enjeu essentiel soulevé de lâcher les chiens pour en finir avec l'écrire sage.
Bien vu! Merci pour ces images qui me parlent.
Merci Irène ! Content que vous ayez retrouvé vos lunettes et choisi de consacrer un moment à ce matelas !
Bien décrit avant d’être jeté aux encombrants, votre matelas. C’est inspirant. Merci.
Grand merci Simone. Mais mon matelas bien loin de l’intensité de vos textes !
Quel bel objet dans ces lignes! Beau choix, beau texte.
Merci à toi Rebecca. La lecture de ton codicille m’a aidé à choisir ce matelas !
Bonjour Jérôme,
la saga des matelas est plutôt sage, quand le codicille en forme de texte décharné, écharpé, cisaillé, retourné – serait (peut-être) le hors-série,
(ce commentaire n’est pas cool pour la saga, qui elle coule sans rien faire de mal, et bien, faisant le job et largement, mais j’espère que vous voyez comment la folie du codicille rend à l’objet au rebut un hommage saisissant ) (si ce que je dis vous ennuie, ne pas hésiter à me le dire, je l’enlèverai)
Très important pour moi votre commentaire Catherine. Je garde ! Je prends ! Vous mettez le doigt sur quelque chose que je sentais sans le voir clairement par rapport à ces codicilles. Cette pratique a été lancée lors d’un cycle précédent auquel je ne participais pas et ce fut un de mes regrets. MERCI !
J’ai aimé la brièveté du texte et la force de l’évocation, le fait que ce lit nous renvoie fort vers notre fin…
ça me ramène également à ces visions post-catastrophe et je sais ce que ça veut dire pour avoir contemplé des mois durant il y a quelques années les immenses bennes qui récupéraient ce type d’objets devenus déchets suite à un événement destructeur…
Merci Françoise ! La brièveté parce que très compliqué pour moi de faire long. D’autant plus touché que je suis toujours impressionné par la fluidité de votre écriture et la cohérence de votre projet.
très bon choix ce matelas, bravo.
Merci Laurent !
Oh oui, quel beau choix, beau aussi le texte que vous en faite. Quel début, le ring, j’adore, puis passer aux corps morts jusqu’au matelas auréolé… Avec un peu d’histoire… Et triste que matelas ne s’ecrive pas avec le « t » de matelot, ça aurait beaucoup plus de gueule. Tant pis pour lui. L’image elle me restera. Merci.
Merci Anne d’avoir pris le temps de lire et commenter ! Précieux !