Je compte parmi mes amis un pull marin bleu. C’est un type un peu sauvage – il est pêcheur d’Islande. Il a pour parentèle, un mouton Mérinos et une baleine à bosse. Il porte sur l’épaule gauche, trois petits boutons en corozo qui me rappellent qu’il fut aussi un enfant. Il n’irrite pas, se froisse pas, ne pue pas et s’adapte souplement aux contingences. Il est doux sans mièvrerie, chaleureux sans effusion, sec sans dureté. Il pèse lourd mais me tient. Son âme est d’un bleu profond presque noir. Son encolure est ronde mais ses mailles en côte filent droits : s’il a des tiraillements secrets, il n’en laisse rien paraître. Je le soupçonne d’être un brin puritain. A l’âge de six ans, j’ai eu un ami comme lui, un pull marin bleu, que j’ai perdu et que j’ai regretté longtemps. Plus tard, j’en ai offert un à mon père qu’il a porté jusqu’à son dernier jour. A la fin, le cancer lui bouffait tellement la chair que le pull flottait sur son corps décharné. Il m’a confié que ce pull, ce bon copain, malgré tout parvenait à le réchauffer. Quand il est mort, j’ai voulu laisser le pull dans son cercueil pour l’accompagner dans le froid de la mort mais finalement je me suis ravisée et je l’ai gardé. Après tout, ce pull marin est la seule chose qui me reste de mon père.
J’aime bien, le choix de l’objet, le texte. Beaucoup sa description, beaucoup le cadeau au père, presque tout en somme. Cependant (je m’autorise une remarque) un petit problème de compréhension pour moi de la phrase charnière entre les deux: A l’âge de six ans….regretté longtemps. On quitte le pull?
En tous cas bravo
merci de votre lecture et de votre remarque pertinente. je ne suis pas encore satisfaite mais cela va venir (peut-être).
il a fallu notre rencontre (enfin nos rencontres) d’hier pour que le découvre (me noies dans des verres d’eau et encore plus dans la masse des contributeurs ! et vais me noyer encore davantage entre les derniers jours du festival et une présence Rosmerta lundi) et comme tous je vibre à l’idée du chandail de marin…