Le poêle, celui qui trône au milieu du séjour, près de lui un fauteuil confortable, un livre entrouvert, le chat lové sur un coussin, poêle noir, renflé en son devant s’épanouissant en hublot de verre, au repos, paisible, il attend d’être chouchouté, nettoyé par le ramoneur, assuré de très vite retrouver vie, une soirée plus fraîche, une pluie battante, des rafales de vent, la neige, et hop en lui s’engouffrent du petit bois, des bûches de fayard, et hop une allumette, il est heureux de s’enflammer, de jouer avec le feu, de ronronner avec le chat qui l’accompagne en sourdine, douce mélodie, crépitante parfois, avec ses flammes qui s’élèvent hautes, bleuissantes, éblouissantes, qui deviennent braises rougeoyantes, vers lesquelles ses hôtes tendent leurs mains pour les ranimer, leurs pieds qui ont quitté les bottes humides, et lui s’échauffe, les réchauffe, monte en puissance, il les tient dans son cercle de chaleur, toujours égal à lui-même, bienveillant, source de bien-être, de calme, de silence, près de lui, on ne parle pas, on rêve, on écoute sa petite musique, on savoure une infusion, près de lui le temps s’étire, on attise les braises, on ajoute une bûche, on lit parfois, et lui, le poêle, s’amuse en pensant à Pepe Carvalho, ce détective catalan qui allume son feu en brûlant des livres choisis avec soin dans sa bibliothèque, « pour se venger de ce qu’ils lui ont trop peu appris à vivre tout en le coupant trop d’un rapport spontané et enthousiaste avec la réalité. *». Lui, le poêle de fonte noire, il n’est pas un intello, il se nourrit de chênes et de hêtres mais il est fier d’être écolo, de la nouvelle génération, que son énergie soit dite par les hommes à bilan CO2 négatif, que ses propriétaires soient branchés avec des forestiers tout proches qui gèrent intelligemment la forêt, le voilà rassuré, sûr de son utilité, fier de sa vie, de penser que l’homme utilise le bois pour se chauffer depuis des millions d’années et qu’il est partie prenante de cette tradition, l’enchante.
* Manuel Vasquez Montalban, Les Recettes de Carvalho, 1989, Christian Bourgois éditeur
Je remarquais le ronron du chat et du poêle se mêler à celui de l’écriture et j’ai trouvé dommage que ce ronron envolé soit coupé par un point d’interrogation et un point. Je suis sûre que les ôter n’enlèverait rien à sa chaleur. Merci Christiane !
bien vu, point d’interrogation supprimé, et le ronron s’envole.
vivement que la fraîcheur revienne, que je l’allume ce poêle, compagnon de mes soirées.
belle journée, Cécile
se tenir à côté de lui et se réjouir de l’entendre ronronner comme un long accompagnement inlassable
je suis heureuse que vous ayez senti le plaisir que j’éprouve à l’écouter ronronner – le chat aussi – en lisant, en rêvant.
merci, Brigitte