Flacon transparent ou de couleur vert hôpital, rigoureusement en plastique, contenant du liquide sous la forme du gel alcoolique antibactérien, il se présente avec des formats plus ou moins grands, flacon de poche de 30 à 100 ml à emporter dans le sac, ou bien flacon pompe pour un usage collectif, de 300 ml, 500 ml, 1 litre, 3 litres parfois, inséré dans des bornes en métal qui le cachent et le protègent de possibles pillages et favorisent l’appui du pied plus hygiénique que l’appui des mains porteuses de germes et bactéries, parfois il est en distributeur mural, c’est-à-dire fixé au mur, ou électronique, c’est-à-dire qu’il ne faut pas le toucher, mais juste l’intercepter, parfois en bidon de 3, 5, 10 ou 20 litres, hypoallergénique, à PH neutre, sans ou avec parfum, à l’aloe vera, la solution hydro-alcoolique m’accompagne au quotidien dans la protection de ma vie. Là où je vais je transporte la petite bouteille en format 100 ml dans ma poche, et là où je vais je m’arrête pour rendre hommage au Totem sous ses différentes formes. La pression manuel, pédale ou électronique du flacon permet d’en tirer une quantité indispensable au bon déroulement des rencontres, selon sa composition il peut être gélatineux ou liquide, il faut avouer que j’ai une préférence pour la forme liquide, la solution, souvent enrichie d’huiles essentielles, ce gel ou solution, sous quelconque de ses formes, permet d’initier le rite de la rencontre non plus par un rendez-vous des mains contaminées des bactéries et des germes, mais par un lavage, nos relations commencent ainsi par ce moment humide, gélifié, un rite ancien qui se déroule sous le regard attentif de l’autre, cette caresse de soi-même à soi-même pendant que tu regardes de manière étourdie, attentionné parfois, mes mains qui s’échauffent qui se serrent, qui se massent, mes doigts qui se croisent, ce rite du bruit du frottement, dans cette chaleur solipsiste de mains collantes, parfois pâteuses, glissantes quand le gel est liquide, et tu me souris quand j’ai terminé de laver mes mains, et c’est bon, maintenant nous sommes sereins, les bactéries sont exterminées, les germes anéantis, le virus est découronné par la force de l’alcool, je peux avancer et nous pouvons nous rapprocher pour des contacts maintenant assainis, nous assainissons les espaces ainsi, de désinfection en désinfestation, nos contacts deviennent impromptus, à force d’appuyer sur les flacons, le désinfectant efface nos mots et nous assainissons nous–même, la parole s’étoffe, s’étouffe, je désenchante dans cette mélancolie alcoolique, alors que la bouteille reste là, avec son pressoir, tout en plastique, tout droit, de désertification en déchéance l’alcool dissout la parole, nos pensées sont ainsi propres et le monde est maintenant à sa place. Et toi, l’hydre alcoolique.