Quelque chose a changé, elle l’aurait fait d’un coup, la tenant entre l’index et le majeur sans serrer, juste en l’effleurant avec la pulpe de ses doigts. Enfoncer, mais à peine, la tige de métal pour faire sauter le tiroir de la carte. Comme avant avec la montre : Là, regarde, juste là, le petit trou… Enfonce la flèche, tu sens ? Tourne pour remonter. La petite flèche de métal glissée dans l’orifice presque invisible pour ranimer le mécanisme de la montre. Une première tentative. Une autre : trouver « le truc »… après même en fermant les yeux ( la flèche de métal rangée dans la boîte à dents de lait avait fini par disparaître, on prenait une aiguille arrondie, dans les plus fines, l’épingle à cheveux c’était trop gros)… On avait fini par trouver on l’avait remplacée la petite flèche de métal fine comme un crin de cheval… La montre s’est perdue. La boîte à dents de laits avec la mèche, les aiguilles et le ruban aussi. Cette montre qui se remonte qui lui avait été offerte pour ses sept ans : par qui ? ( « c’est mon pépé qui me l’a donnée » dixit Samuel B)…On ne pose jamais sa bague, ni sa montre, sur le rebord du lavabo, on les garde les entre ses dents avait dit sa mère. Une nuit dans un train de tournée, elle voyageait beaucoup pour jouer, elle avait oublié sa bague… Celle qui lui venait de… Là c’est un trombone déplié, la tige double comme un diapason minuscule livré avec le téléphone, est perdue. Un trombone déplié pour faire surgir la carte mémoire . Faire surgir la carte mémoire et rugir de n’avoir plus les doigts ni assez fins, ni alertes… Tout est tellement ?… « nano » ? c’est comme ça que vous dites? Elle tremble, un très léger tremblement en avançant ses doigts – elle perd parfois l’équilibre, dans la ville elle avale les kilomètres à pied avec son téléphone dans sa poche–, elle avance ses doigts : même avec mes lunettes je n’y vois rien, tout est tellement… Et tenir le trombone déplié, le glisser pour faire sauter le petit tiroir, celui « à mémoire » elle dit, et rit. … soudain elle se souvient. De ce jour-là, de ton pied nu dans l’herbe: au bord de la rivière, vous jouiez jusqu’à la nuit, nus comme des petits Moujiks … de cette écharde. Pose ton pied! Mais j’ai peur… mais ce n’est rien… Avec l’aiguille de sa broche, d’un coup ! d’un seul coup elle avait fait sauté l’écharde ! Sur le bout de mon doigt, tu la vois? …
J’aime beaucoup. Moi aussi, ça m’occupe ces habiletés qu’on a perdues ou jamais maîtrisées.
Merci Daniele… ça nous occupe nous ralenti (et on invente d’autres chemins pour continuer)
Merci Nathalie pour cette collection, tourbillon, de gestes et d’oublis, d’objets et de caches, d’aiguilles et d’échardes. Je suis allé vérifier après vous avoir lu : l’aiguille de seringue que je conserve contre les échardes est toujours à sa place dans la boîte dans la bibliothèque avec le compte-fils et une pince à épiler pointue.
Oh merveilleux les enfants peuvent courir partout pieds nus… merci Ugo
Nathalie (et du coin de l’oeil je vois qu’il y en a encore…) quels cadeaux vous nous faites !
Ugo moi les pinces à épiler je n’arrive jamais à m’en servir même pour les sourcils… faudrait que j’essaie pour les échardes
Ah Brigitte merci de venir lire ( je ne sais pas si c’est un cadeau, c’est peut-être un abus d’espace. Sorte de remède aux petites crispations de février. )
Ah j’adore !