La violence : Caractère de ce qui se manifeste, se produit ou produit ses effets avec une force intense, brutale et souvent destructrice.
Elle ouvre le dictionnaire, pour comprendre enfin : Caractère de ce qui se manifeste, non, il y a une erreur, cette violence, elle ne s’est pas manifestée, c’est l’inverse, elle n’a jamais existé, elle a été effacée. L’air qu’elle respire a plus d’existence que cette grande violence, le bruit d’une feuille de papier qui tombe au sol est largement supérieur au bruit de cette violence. Cette violence est silencieuse comme un regret. Cette violence elle ne s’est pas manifestée, car elle n’en avait pas besoin, elle est partout et pour toujours, elle est comme un membre amputé qui à chaque occasion, lui rappelle que cette partie d’elle est morte, elle n’existe pas, comme ce membre qui n’existe plus et qui la gratte comme la gale.
Elle produit ses effets avec une force intense, brutale et souvent destructrice : non, c’est l’inverse, elle ne produit rien, mais, elle est là comme un trampoline sur lequel sa propre violence pourrait rebondir et s’amplifier et avec laquelle elle doit lutter les jours de rage.
Est-elle brutale : non, elle l’oxyde lentement en douceur, année après année, elle assèche son âme sans effort, comme le sel ronge le fer, elle serait destructrice, comment le savoir, comment savoir si une partie de ce membre fantôme aurait souffert d’un coup ou d’une coupure, il faudrait qu’elle imagine des sensations qui lui sont étrangères et qui sont peut-être celles d’une autre espèce. Cette violence, invisible et silencieuse, sans poids, sans force, sans existence, la coupe du monde et des autres, sans exister. Il lui faudrait revivre sa vie avec cette partie d’elle disparue, et peut-être que les dégâts lui apparaîtraient avec évidence, et le vacarme et les blessures de cette catastrophe lui sauteraient au visage et à chaque coup de crocs, elle saurait.
Mais elle ne sait pas. Elle a connu cette violence du dictionnaire, cette montée d’adrénaline, en donnant des coups ou en les recevant, mais elle ne s’est jamais sentie aussi vivante qu’à ces moments-là, et quand elle regarde en arrière et qu’elle cherche ce qui l’a détruit, elle ne voit que ce tunnel glacé.
C’est très fort Laurent, cette violence sourde, invisible, qui peut être tellement pire que les coups physiques. Cette violence qui ne se voit pas, ne se parle pas. Si j’ai bien compris ce que tu as voulu dire ! Merci. Bien à toi.
Merci. Oui, tu as bien compris. Mais même si cela peut semblé étrange, les bagarres d’enfant ou d’ado, auquel on participe ou que l’on voit, sont des moments de vie intenses. On n’est pas une victime quand on se bat (que l’on gagne ou que l’on perde). Mais celui qui est dans cette position de l’animal blessé, pris dans un piège, auquel il ne trouve pas de solution, où parfois tous les mots ont disparus, où il subit une violence, il est une victime. La violence dure autant que le temps où il est une victime (en lui). Je n’ai pas de compétence dans ce domaine, ce ne sont que quelques idées.
J’aime bien cette construction à partir d’une définition du dictionnaire. Expliquez en remettant en cause, expliquez que non, pour pénétrer dans les interstices et jouer de la précision. Merci Laurent.
gorge serrée
‘ »elle l’oxyde lentement en douceur »