Je ne sais pas s’il s’agit de mon premier cinéma mais c’est le premier dont je me souviens. Gaumont Grand-Quevilly, année 2000, j’ai cinq ans. Je suis avec mon frère aîné qui a 18 ans de plus que moi et notre petite sœur, âgée alors de trois ans. J’ai déjà eu cette discussion avec elle, pendant ces moments où nous nous remémorons nos souvenirs d’enfance. Elle ne se souvient que très vaguement de cette journée ou de cette soirée, on ne sait pas. Il y avait du noir mais c’était peut-être seulement celui de la salle. J’ai un doute sur le fait que nous avions mangé ou non au Mc Do avant. Car par la suite l’un n’allait que rarement sans l’autre grâce à ces fameux Mc Ciné. Notre frère avait très certainement opté pour le meilleur dessin animé à l’affiche. Il se trouve que c’était un Disney mais pas n’importe lequel, pas un Disney de princesses mais Dinosaure. Je me souviens de l’odeur du popcorn et des bonbons mais je ne sais pas si c’est ce qui m’a le plus marqué lors de ce tout premier cinéma. Le Gaumont est grand, nous sommes toutes deux à nous tenir à une de ses mains. Nous entrons dans un couloir sombre, des enfants font du bruit mais nous sommes plutôt sages. Notre frère nous ouvre une grosse porte, nous passons sous son bras pour entrer et nous voilà arrivés dans un grand espace avec de nombreuses rangées de fauteuils rouges. Il y a comme une odeur de chauffage. Il y a toujours le bruit des enfants, je sens une agitation dans cette salle, ce que nous allons voir va être incroyable, nous vivons quelque chose de très important. Les yeux de notre frère cherchent la meilleure place. Nous nous asseyons, mon frère au milieu, ma sœur à sa droite et moi à sa gauche. Je regarde partout, je crois qu’il nous explique que nous allons voir les dinosaures sur l’écran géant. La salle s’assombrit, un enfant pleure. Je ne me souviens pas des publicités, ni de l’intégralité du film mais je revois les têtes gentilles des dinosaures, je ne me souviens pas des méchants. Ils sont immenses dans cet écran lui-même immense, cette salle immense de ce bâtiment immense. C’est confortable mais nous ne nous sommes pas endormies, pourtant je me souviens que des dames réveillaient des enfants au moment de partir.