A la bourre. Je me retrouve dans l’étroite entrée, partiellement habillée, dos à la salle de bain. La porte qui me sépare du monde extérieur est sur la droite. Les clés sont en place sur la serrure. Au-dessus de moi, les patères supportent vestes, blousons, foulards. Au sol, les chaussures. Le sac à main à portée. J’ai rechargé les piles de l’enregistreur la veille, vérifié que le voyant rouge s’actionnait, que l’appareil fonctionnait. Se rassembler. Je m’immobilise. Ne pas s’imaginer dévalant l’escalier, les six étages qui séparent des terrestres, franchissant les trente mètres qui mènent au métro. Je me rassemble et cherche du pied les ballerines roses, les yeux levés sur les patères. Ce sera le blouson de skaï violet, celui qui s’ajuste bien. Les chaussures sont réunies, le pied droit s’insinue sous le cuir. Je m’empare du blouson par le col et m’apprête à enfiler une première manche. Le pied gauche suit sa course, la deuxième manche enfilée. Pieds et bras dûment logés, j’abaisse les yeux sur la fermeture éclair. Je me saisis des glissières, les fais coïncider, commence à remonter le curseur, passe l’abdomen. Soudain ça coince. Je tire de part et d’autre les pans du vêtement pour dégager le curseur. Inutile, il reste désespérément immobile. Ca augure mal d’un lundi matin. Pas de temps pour les atermoiements. J’attrape une écharpe à la volée, le sac à main, les clés. Je claque la porte derrière moi, commence à dévaler l’escalier. Dix minutes plus tard sur une banquette du métro, le coeur encore battant, je ne peux pas me permettre un retard aujourd’hui, ma main tripote machinalement la languette de la fermeture éclair. A l’école maternelle, j’avais du apprendre, comme tout enfant, à faire mes lacets. Je n’étais pas douée. J’étais gauche. Pour toutes les actions manuelles, j’étais mal-à-droite, pas gauchère. Certaines langues étrangères sont plus formelles quand elles désignent la sinistre orientation. J’étais gauche et je redoutais l’hiver, l’anorak et sa fermeture éclair.
Solidarité totale. Merci Stéphanie.
Quand elle se coince, c’est terrible, mais sinon quel progrès comparé aux boutons.
« J’étais gauche et je redoutais l’hiver, l’anorak et sa fermeture éclair. » j’aime cette phrase et l’urgence qui la précède…
Merci Nathalie de si bien saisir mon intention. Bonne journée !
(non mais ça va comme un lundi matin) (très bien) (parfaitement)
Merci à tous pour vos passages solidaires au dessus d’une fermeture éclair. Bonne journée !
comme Ugo solidarité totale (et le pire : les fermetures éclair va-et-vient dont le fonctionnement m’est toujours resté étranger)
j’espère que tu n’as pas été en retard et que l’enregistreur a bien fonctionné…
prise dans ton souffle et ta crainte justifiée des fermetures éclairs…
Merci pour la passage ! Tout est inventé sauf le décor et les accessoires… Je voulais créer de la tension avant l’entrée en jeu de la fermeture éclair (je les redoute toujours). Bonne journée Françoise !