La place n’est pas centrale, non ce n’est pas la place du marché, ni même de la mairie ou encore de la poste. Cette place n’a de sens que pour les usagers des cars, puisqu’ici on ne dit pas le bus, appellation trop citadine, on ne dit pas non plus le car avec l’accent anglais, mais un car bien sec, avec un k tranchant et un a bien ouvert. Elle fait peine, même pas de goudron, seul un gravier au gris délavé, blanchi par les piétinements des écoliers automates qui n’ont plus qu’à emprunter le petit chemin entre les HLM aux briques rouges. Des couleurs aussi désuètes que leurs tenues, ronron matinal, troupes blasées, sapées par l’air du coin qui t’asphyxies insidieusement. Aujourd’hui, triste ironie, la place des cars est la vitrine de la ville, parking goudronné à panneaux solaires, briques des HLM dissimulées sous triple isolation écolo, couleur crème, bien lisse, et les bus arrivent dans la rue de derrière, timing précis, sans laisser le temps aux gens du coin de réaliser qu’ils ne sont que des figurants dans le théâtre de leur vie quotidienne.
des habitants figurants dans le théâtre de leur vie quotidienne, très fort.
Merci Françoise , suis touchée en retour
j’ai retrouvé ce goût un peu amer dans la bouche en ces matins si tôt où je devais prendre le car pour regagner la ville, où le sommeil aurait bien continuer à me happer toute entière…
nous autres, figurants d’apparence (enfin je l’espère car intensément projetés dans l’intérieur de nos vies…)
Ravie, Françoise, que mon texte provoque de telles réminiscences, à très bientôt dans nos textes! merci