Nord, une villa Toscane à travers le feuillage d’un chêne, puis la marine, la tour génoise illuminée le soir tombant. Au delà trente kilomètres de virages et lacets, j’ai de cette route vers le nord de l’île surtout des images de nuit, elle n’en finit d’épouser la côte, plongée qui inquiète, le vide est du côté de la place du mort. À l’horizon Capraia. Je n’aime pas cette direction, Nord, celle que l’on prend pour quitter l’île.
Sud, la succession des marines, pans de montagnes se dégradant du brun au mauve pâle. Le port de Toga. Le cordon lagunaire qui résiste à la catastrophe, le souvenir des pins, de l’odeur de l’été. À la pointe de Biguglia l’Apocalypse, on disait l’Apo. Marie y allait danser même s’il y avait là quelque chose de sulfureux, c’était le clan de La brise de mer qui tenait la boîte. Des corps qui dansent, sur quelle musique ?
Est, c’est la lumière. l’attraction de l’île d’Elbe et de l’horizon, la couleur dense de la mer, encore alourdie de nuit sous le levant, la palpitation de Pianosa et les grandes pierres brunes qui s’enfoncent dans la mer. L’idée du froid de l’eau sous mon corps, du vide en-dessous, le vertige des profondeurs, la brûlure d’une méduse. La chaleur des aubes qui se répand, ce qui s’éveille, mille chants d’oiseaux, miroitements qu’on observe à travers nos doigts écartés.
Ouest, la menace d’un orage, de fin du monde. La départementale puis la montagne, et le peuple de la montagne, sangliers, belettes, musaraignes, tarentes et grenouilles. La corniche, la route de San-Martino et savoir pas loin le cimetière. Des pierres qui s’ajoutent aux pierres. Sur les pierres des formules comme des demandes de pardon. Le corps de Petra, la sensation de douleur, un ventre qui se souviendrait de l’annonce de l’inéluctable, de la peur, du chagrin, du dernier regard, de l’absence. De l’Ouest la lumière du soir s’évapore et l’ombre enveloppe nos blessures.
des « miroitements qu’on observe à travers nos doigts écartés », c’est exactement ce que fait le texte (et les pardons écrits sur les pierres, ça aussi)
merci Christine, je tente de remonter à bord, ton commentaire est précieux. Et je vais vraiment tenter d’approcher de plus près ton manuscrit.
merci pour ces noms qui chantent
et les images qu’ils entrainent ici