Séraphine travaille. Elle n’a pas que ça à faire, aller à la grotte. Elle se lève tôt. Elle aide à la cuisine. Elle aide à l’écurie. Elle travaille et elle prie. Elle récite le Je vous salue à genou. Elle va vers la croix à la croisée des chemins juste au-dessus de la forêt. Elle prie pour Florida. Elle la confie au bon Dieu. Gaspard aussi et la petite. Et l’enfant mort. Séraphine va à l’école. Elle écoute le régent. Elle lit, elle calcule, elle écrit. Elle ne sort pas du lot. C’est une petite fille comme les autres. Elle est un peu bornée, n’a pas très bon caractère. C’est de famille. Chez nous, on aime quand ça file droit, on n’aime pas quand ça fignole. Séraphine ne veut pas faire autrement que les autres. Elle connaît son avenir : trouver un mari, faire des enfants, travailler, prier. Ce n’est pas encore le moment. Elle rentre de l’école. Elle aide pour le souper. Elle met la table. Les hommes arrivent pour manger. Ils ne disent rien, ne s’attardent pas, semblent fâchés. Il n’a pas assez plu cette année. Les récoltes ne vont rien donner. Ils disent ça chaque année. Et les récoltes donnent quelque chose. Séraphine écoute le peu de mots qu’ils disent, elle les retient, pense à son futur mari qui dira la même chose dans une autre ferme. Puis c’est déjà l’heure de dormir. Elle fait sa prière. Notre Père qui êtes aux cieux. Elle pense à Florida, à Gaspard, à la petite, à l’enfant mort. Elle n’arrive pas à ne pas penser à eux. Ça ne sort pas d’elle.
Ta dernière phrase résonne en moi encore à la deuxième lecture…
magnifique le rythme que tu as adopté là, qui d’ailleurs est souvent le tien…
Beaucoup aimé ce portrait de Séraphine…