C’était toute une ménagerie que vous accueilliez au 2514 Lakewood. Chats, chiens, oiseaux, les vôtres et tous ceux du quartier, les tatoués comme les sauvages, avec un œil, toujours, sur les estropiés et les mélancoliques. Vos poches étaient pleines de graines et de croquettes. Votre cuisine, en particulier dans la touffeur de l’été 81, sentait la nourriture déshydratée, le caca des inséparables en cage, la litière mal vidée. Votre solitude était remplie de ces présences. Votre sillage portait celui des animaux que vous nourrissiez, et c’était, à chaque pas, comme le refus obstiné du wintergreen et du fresh cotton que sentait l’Amérique. Une odeur de poil humide, de viande séchée, de graines huileuses. Un jour, pénétrant dans votre salle de bain, j’ai trouvé sur la coiffeuse ce coffret Guerlain de 1935, et à l’intérieur, dans la soie rose, une larme de Jicky. En soulevant le bouchon, un instant, s’échappa l’esprit d’un temps d’avant l’Amérique, d’avant les chiens, les chats et les oiseaux – un sillage intime, inaccessible à Detroit.
Jicky ! Oh, Jicky était merveilleux ! Ca donne envie d’en retrouver là, tout de suite !
Très fort. Excellent. Subtil. Merci Xavier
comme je l’aime ce texte à rebrousse poil!
Subtile évocation d’un monde passé. C’est réussi.
à lire ce texte, surgissent des odeurs de maison avec animaux et personnes fragiles
très fort et ce rebrousse poil comme dit Nat…