Je n’ai pas assez parlé de cette odeur, pourtant c’est elle qui vous prenait au nez à peine sortait-on de la bouche du métro. On savait bien ce qui se passait ici, on voyait ça tous les soirs à la télévision et pourtant, on y revenait. Et cette odeur, c’était la première chose qui confirmait qu’on y était. Ça et le vrombissement des hélicoptères au-dessus de nos têtes. Ça grattait les gorges, ça piquait les narines, parfois même, ça raclait l’œsophage avant de sortir comme un crachat sur le sol.
C’était une odeur d’apocalypse: la fumée des barricades qui occupait et colorait le ciel, la sueur des membres entrelacés faisant reculer les lignes ennemies et le piquant des lacrymos. Le métal dans ma bouche quand je suis tombée à terre dans un mélange de détritus et de boue qui collait aux chaussures. L’air lui-même était explosif, on n’attendait plus qu’une étincelle pour faire disparaître ce vieux monde. Et l’allumette était entre nos mains.
Merci beaucoup Irène pour ce texte très dérangeant, qui remue, qui monte au coeur, qui concorde, qui entrelace, qui serre dans les bras
J’adhère totalement