Elle se prépare à sortir. Si elle n’est pas en train d’écrire, de réfléchir, de lire ou de dormir, que peut-elle faire dans cette chambre d’hôtel rikiki ? Elle commence à s’y sentir à l’étroit, à étouffer presque. Elle vient de prendre une douche froide. Ça dure quelques minutes à peine. Pas le temps de sentir l’eau ruisseler sur ses bras, sa poitrine, son dos. On se dépêche, c’est dynamique. Elle commence toujours par le bas, le seul endroit où elle s’attarde ce sont les jambes, surtout en été. L’eau froide lui permet de ressentir son corps à nouveau, comme s’il se remettait à neuf ce corps que trop souvent on oublie tant on est habitués à ce qu’il nous suive partout, qu’il se plie et s’adapte sans cesse à ce que nous attendons de lui. Après une nuit quasi blanche, où il se rappelle à elle avec des douleurs un peu partout, elle hésite, se dit qu’elle ne veut pas le malmener. Elle est sortie du lit, son corps a eu du mal à suivre les quelques instructions que son cerveau parvient à lui donner. Ses bras et ses jambes fonctionnent au ralenti, d’ailleurs son cerveau non plus n’est pas d’une grande vélocité ce matin. Une barre à la tête est sa manière de lui exprimer son malaise dû au manque de sommeil. Elle n’a d’autre choix pour le coup que de s’aligner sur son rythme à lui. Le contraire ne se produira pas aujourd’hui, elle le sait. Inutile de le forcer. D’autant que pour corser la chose un peu plus, l’anxiété s’est immiscée dans son abdomen et son thorax et exerce une pression des plus désagréables. Décidément, son corps est mal dans sa peau et il le lui fait savoir. L’eau froide lui a fait du bien mais il reste douloureux. Elle décide de faire quelques étirements, quelques postures de yoga avant d’enduire de crème hydratante sa peau asséchée par l’action du gel douche. Elle serait chez elle, elle n’aurait pas envie de mettre le nez dehors un jour comme celui-ci, d’autant que la météo est des plus rébarbatives. Parfois, entre son corps et elle, il y a comme une mésentente, ils ne sont pas sur la même longueur d’onde. Même fourbu et laminé par le manque de sommeil, il lui réclame du mouvement qu’elle, ou plutôt son cerveau engourdi, rechigne à lui donner. Elle s’habille avec une extrême lenteur, se brosse vite fait les cheveux, se passe un peu de maquillage sur le visage pour dissimuler les cernes dont il la gratifie depuis quelque temps. Elle pose la main sur la poignée de porte, hésite quelque secondes, puis l’ouvre d’un geste saccadé. Un café leur fera du bien.