Elle est là, évanescente, insaisissable, pure, il la regarde en filigrane. Elle est assise sur le rebord d’une fenêtre ouverte sur le jardin et a l’air transparente dans cette robe rehaussée par la lumière du dehors. Elle tourne la tête de temps à autre et sourit.
Il entend son rire qui rebondi dans l’écho et comme à chaque fois qu’il la regarde, elle resplendit. Ses pieds ne font qu’effleurer le monde tant elle est légèreté, joie et simplicité. Elle tourne et se retourne, se soulève, recule et revient, elle danse dans un temps qui n’existe pas.
A cet instant, il décide de s’asseoir à ses côtés dans le souvenir d’une nuit de juillet.
Il est là dans cette pièce, posé dans un fauteuil vert qui fait face à un miroir dont les branches entrelacées annihilent l’utilité. Il s’y regarde sans se voir tant il est nerveux et impatient. Ses yeux fixent un lustre imposé et imposant dont les petits cristaux se balancent au gré des pas qui rythment le plafond.
Elle est là, dans sa chambre, juste au-dessus du salon, et elle joue avec ses longs cheveux : faut-il les emprisonner ou les laisser libres ? Elle les laisse descendre sur son sein, les enlève, les remet, sourit, se tourne, s’observe et jubile. Elle ne s’habillera pas. Ou peut-être si. Elle laissera au temps l’espace nécessaire pour se découvrir, dans tous les sens du terme et de la vertu. Elle aime imaginer les minutes à venir, les attraper et les faire patienter. Vous n’êtes pas encore là que je vous ai déjà mises en tête, se dit-elle. Je vous ai enfermées dans mon corps et vous ne pourrez ressortir que quand je le verrai. Les minutes s’entassent dans un cœur qui commence à se battre de plus en plus fort à force d’être envahi par l’inconnu. Elle hume l’air qui respire le feu de bois et la résine de pin.
Elle est prête à descendre, à le surprendre en entrant par le jardin, elle est prête à l’enlacer sans se lasser. Elle sort.
Il la sent arriver, son odeur, un bruissement presqu’imperceptible, il va l’étreindre, la saisir, la toucher, la vivre mais alors qu’il s’approche de la fenêtre, il l’attrape, ralentit, son cœur bondit… Ses doigts se referment sur un voile blanc et transparent. Son cœur tombe. Elle s’est volatilisée. Envolée. Echappée.
Il soupire, se prend dans les bras et le silence du passé où ne subsiste rien d’autre que l’impression d’une empreinte faite à son corps.