Depuis l’enfance l’argent me préoccupe, plutôt le manque d’argent me hante. Nous cultivions sur notre petit lopin de terre fruits et légumes que mon frère tentait de vendre, mon père possédait un Rickshaw acheté avec un micro-crédit, flambeau illusoire de l’innovation pour aider les pauvres, et parcourait les ruelles pour de petites courses. L’idée même de la pauvreté m’obsédait alors qu’à quelques kilomètres de chez nous à Chowara, des hôtels de luxe pour riches curistes ayurvédiens me provoquaient; j’ai toujours su que le fardeau à porter ne serait pas le mien et d’ailleurs mon frère semblait tout désigné… Dans notre État du Kerala le plus alphabétisé d’Inde, balloté tour à tour par les communistes et le parti du Congrès, les études et la santé sont acquis et je comptais en profiter. Oui « profiter » aux consonances ambivalentes où se mêlent convoitises et nécessité. Mon frère Raja avait le sens inné des nécessités et cela me permit de pouvoir continuer mes études en médecine. C’est lors d’un stage de spécialisation en médecine ayurvédique que j’ai rencontré Regina, celle qui allait devenir ma femme. Sa famille, celle d’un négociant en pétrole russe avait éprouvé son habileté à faire de l’argent. Après le mariage catholique polonais, les négociations pour les fastes d’un mariage indien, nous étions vraiment mariés, la Pologne pouvait nous accueillir. Poussé par une ambition à portée de réalisation, c’est la création d’un cabinet de massages, une opportunité pour terminer mes études, et pratiquer l’enseignement du yoga. Le temps c’est l’argent que j’envisage de gagner et l’idée d’organiser des voyages en Inde pour cures ayurvédiques germe. Les commissions que je négocierai avec le centre paieront les déplacements et mes séjours dans l’établissement. Ce qui fut dit fut fait…
étonnant tissage entre hantise de la pauvreté, volonté de réussir et débrouillardise, tout ça sur fond de décor indien…
ah pour ça on voyage, du Kerala à la Pologne…. et voilà notre narrateur marié à Regina et vendeur de stages ayurveda…
merci Raymonde pour nous imaginer tout cela…
Vous nous emmenez allègrement dans votre univers. On a envie de connaître la suite. Merci Raymonde
Comme dirait FB, c’est du funambulisme, chaque pas est une incertitude, merci pour ce partage Elise
Voilà du voyage. Les mots allument des petites lumières de l’ailleurs. Envie de m’y plonger. Merci.
Merci pour cet encouragement, j’espère que les loupiotes surgiront encore ici et là…
Le texte finit à l’endroit où il commence mais à un autre niveau : redoutable spirale. Merci.